dimanche 17 novembre 2019

Mains



La main qui offre un chocolat.
La main qui a toujours froid.
La main qui se cache pour ne pas montrer qu’elle est déformée.
La main qui redécouvre le plaisir de caresser.
La main qui apporte le repas, qui aide à couper les aliments.
La main qui ne bouge plus depuis l’accident.
La main qui depuis deux jours permet au pouce de bouger.
La main qui apporte une lettre et la dépose sur l’oreiller.
La main qui lève le pouce pour te féliciter.
La main qui frotte le dos en signe d’amitié.
La main qui termine la lettre par un cœur, par un petit dessin.
La main qui aide le mouvement encore incertain.
La main qui passe le sel à table.
La main qui applaudit celui qui a enfin réussit l’impensable.
La main qui laisse s’échapper la tasse.
La main qui ramasse les morceaux de la tasse.
La main difforme gênée que l’on regarde avec curiosité.
La main qui tapera le rapport sur le PC, si celui-ci veut bien fonctionner.
La main qui n’attend qu’une chose : rentrer à la maison.
La main qui passe des heures à gratter les démangeaisons.
La main qui allume une bougie.
La main qui a mal et réclame un peu de répit et qui supplie.
La main qui sans hésiter va piquer pour enfoncer l’aiguille.
La main qui essuie une larme.
La main qui sue, qui rame. 
La main qui s’applique à écrire une carte postale.
La main réconfortante qui se pose sur l’épaule de manière amicale.
La main qui renonce à faire avancer la chaise roulante avec dépit.
La main qui ira nettoyer le vêtement souillé et le déposera durant la nuit sur la chaise à côté du lit.
La main qui se crispe à cause d’un spasme, encore une fois.
La main qui redécouvre les sensations de chaud et de froid.
La main qui jalouse l’autre main.
La main qui remet à demain.
La main qui arrive trop tard avec le mouchoir.
La main qui t’aide à couper ta poire.
La main qui retrouve une couleur normale quand les traces de brûlures disparaissent.
La main qui chaque semaine récupère force et adresse.
La main qui a renoncé à se battre.
La main qui est toujours prête à aider et qui se coupe en quatre.
La main qui tremble en portant la cuiller à la bouche.
La main qui vient te frictionner sous la douche.
La main qui t’explique pour la cinquantième fois, avec la même patience.
La main qui n’a pas encore assez confiance.
La main qui te montre par la fenêtre les beautés de l’automne.
La main qui se gante pour vider le rectum.
La main qui, de chambre en chambre va prendre la tension et la température, avec le même sourire à chaque fois.
La main qui à elle seule va couper le morceau de viande pour la première fois.
La main qui soulève péniblement les petits objets.
La main qui apporte le thé. Ah non, j’avais demandé du café, pas du thé. Mais avec du sucre et pas de lait.
La main que l’on attendait pas et qui dépose un petit cadeau sur la table de la chambre vide.
La main puissante qui te pousse quand ça monte avec ce sourire qui te déride.
La main de l’athlète paralympique que j’ai tenue dans la mienne quand nous disions à-Dieu, pour laquelle il n’y aura pas de rime et à qui je dédie ces quelques lignes.




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