J’ai à nouveau imprimé quelques cartes postales… C’est avec plaisir et joie
que je vous les livre.
La première carte postale nous parle d’un gamin de 57 ans qui devait se
faire opérer au dos. Ce récit est plus facile à raconter à la première personne
du singulier qu’à la troisième, je vais donc faire comme s’il s’agissait de
moi.
Or donc : Je savais que je devrais rester aux alentours d’une semaine en clinique, rien de plus précis. Me voici arrivé le mardi dans l’après midi à Gasthuisberg. Dans ma petite tête, il était clair que j’aurais peu l’occasion de sortir de ma chambre et je me disais que le contact avec les infirmières ne serait pas comme à Pellenberg… Mon couloir ne serait pas comme ma rue à Pellenberg : le lieu de rencontres, de partages, d’écoute, de ragots aussi (il en faut… si on ne peut plus « parler sur les autres » où allons-nous ?). Comment, en vivant cloîtré, créer des liens en quelques jours ? Retiendrai-je les prénoms ? Comment m’appelleront-elles ? En attendant que ma cellule soit prête, Madicte et moi patientons dans le couloir-qui-ne-sera-pas-ma-rue. Plusieurs infirmières passent et repassent devant nous, occupées ou préoccupées. Peu de contacts engageants… En voici une qui sourit, un peu. Elle nous montre la chambre, se présente une fois les bagages déposés ; c’est elle qui me prend en charge durant mon séjour.
Les premiers jours se sont passés sans grand-chose à raconter: alité sur le dos, sans pouvoir bouger, tirer ou pousser sur les bras, sans parler des douleurs. Mais … l’infirmière qui nous avait accueillis allait, je l’ignorais à ce moment-là, donner une couleur bien particulière à ma croisière en solitaire. Grande, mince, avec un physique de joueuse de volley-ball, un sourire affiché en permanence, des yeux qui pétillaient. A partir du premier matin, quand elle s’est occupée de ma toilette, elle a demandé si elle pouvait mettre la musique (entendez « la radio »). Chaque jour, elle choisissait une autre radio (Q Musiq, Nostalgie, …). Et voilà ce à quoi j’assistais : elle chante, elle danse, elle se déplace en rythme, imitant Michael Jackson quand elle marche en arrière. Si elle oublie un objet, la voilà sautillante qui se retourne vers la table. Elle contourne le lit avec un pas élégant, pleine de vitalité, les bras dansant autant que les jambes, jamais coquine ou provocante, toujours de bonne humeur, elle a la danse dans le sang. Une carte postale pleine de bonne humeur, de fraîcheur, d’énergie. Je me suis souvenu de l’époque des côtes cassées, il y a deux ans, où chaque rire se terminait par une grimace de douleur. Ici, rien de cela : que des sourires, des rires, un grain de folie communicatif.
Or donc : Je savais que je devrais rester aux alentours d’une semaine en clinique, rien de plus précis. Me voici arrivé le mardi dans l’après midi à Gasthuisberg. Dans ma petite tête, il était clair que j’aurais peu l’occasion de sortir de ma chambre et je me disais que le contact avec les infirmières ne serait pas comme à Pellenberg… Mon couloir ne serait pas comme ma rue à Pellenberg : le lieu de rencontres, de partages, d’écoute, de ragots aussi (il en faut… si on ne peut plus « parler sur les autres » où allons-nous ?). Comment, en vivant cloîtré, créer des liens en quelques jours ? Retiendrai-je les prénoms ? Comment m’appelleront-elles ? En attendant que ma cellule soit prête, Madicte et moi patientons dans le couloir-qui-ne-sera-pas-ma-rue. Plusieurs infirmières passent et repassent devant nous, occupées ou préoccupées. Peu de contacts engageants… En voici une qui sourit, un peu. Elle nous montre la chambre, se présente une fois les bagages déposés ; c’est elle qui me prend en charge durant mon séjour.
Les premiers jours se sont passés sans grand-chose à raconter: alité sur le dos, sans pouvoir bouger, tirer ou pousser sur les bras, sans parler des douleurs. Mais … l’infirmière qui nous avait accueillis allait, je l’ignorais à ce moment-là, donner une couleur bien particulière à ma croisière en solitaire. Grande, mince, avec un physique de joueuse de volley-ball, un sourire affiché en permanence, des yeux qui pétillaient. A partir du premier matin, quand elle s’est occupée de ma toilette, elle a demandé si elle pouvait mettre la musique (entendez « la radio »). Chaque jour, elle choisissait une autre radio (Q Musiq, Nostalgie, …). Et voilà ce à quoi j’assistais : elle chante, elle danse, elle se déplace en rythme, imitant Michael Jackson quand elle marche en arrière. Si elle oublie un objet, la voilà sautillante qui se retourne vers la table. Elle contourne le lit avec un pas élégant, pleine de vitalité, les bras dansant autant que les jambes, jamais coquine ou provocante, toujours de bonne humeur, elle a la danse dans le sang. Une carte postale pleine de bonne humeur, de fraîcheur, d’énergie. Je me suis souvenu de l’époque des côtes cassées, il y a deux ans, où chaque rire se terminait par une grimace de douleur. Ici, rien de cela : que des sourires, des rires, un grain de folie communicatif.
Autre carte postale. En rentrant mercredi, j’ai constaté que l’horloge du
living était arrêtée. C’est terrible : je m’absente une semaine et tout
s’arrête dans cette maison! Allez, ne soyons pas comme l’amer Michel,
sourions ! Il y a longtemps que cette horloge ne s’était plus
arrêtée : depuis avril 2015. Autre symbole d’un retour à la maison :
Madicte a déposé mon alliance sur la table de nuit ! C’est long, une
semaine sans alliance… Je suis heureux de la porter à nouveau.
Carte postale tirée du lit. Ce dimanche je m’éveille à 6.40 h. Il est
l’heure de me sonder. Je devine la boule de cheveux de Madicte près de moi. Si
je me tourne vers elle, je vais me faire mal au bras. Mon bras gauche, le matin,
est toujours en souffrance. Il commence à aller mieux deux ou trois heures
après le réveil. Comme j’aimerais caresser les cheveux de ma Douce, lui dire un
petit mot tout doucement à l’oreille pour qu’elle ne se réveille pas trop
brusquement. Un peu de la tendresse qui nous a été enlevée, volée, je ne
demande pas beaucoup. Je pense que, de tout ce qui m’a été enlevé, le plus dur
ou le plus triste à assumer, c’est ce vide qui remplace le langage du corps.
Résultat, comme souvent, mes yeux s’humidifient et j’essaye de passer à autre
chose. Cette carte postale n’est certainement pas en couleurs…
Une dernière carte postale, avant de passer à autre chose. Pour notre
avocat, nous tenons le compte de toutes les heures prestées comme aides chez
nous. La moyenne est de 70 heures par mois. Ce doit représenter à peu près ce
que je faisais autrefois dans le jardin, sur les toits, dans les corniches.
Durant mon séjour à Gasthuisberg, nous nous sommes retrouvés dans une
situation bien connue: Madicte à la maison et moi en clinique. Madicte me
confiait comme elle avait tourné en rond, comme ses journées lui semblaient
vides, elle pensait à moi et aux heures de souffrance physique. Elle a eu du
mal pour se nourrir correctement, tout tournait dans sa tête ; elle devait
gérer le quotidien, l’urgent, l’important, l’énervant, le médical, le fiscal,
le fondamental, le parental, le professionnel, le relationnel, l’émotionnel. De mon côté, j’avais mal, oui… Mais je n’étais
pas seul ! Le personnel du département neurochirurgie était très attentif,
prévenant. Je ne suis jamais resté une heure sans contact avec une infirmière,
un docteur, la bibliothécaire, une visite, une femme de ménage. On a très
souvent pris ma tension et ma température ; on venait voir si je n’avais
besoin de rien, on m’a proposé des antidouleurs plusieurs fois par jour. Je
pense que ma situation était plus simple (pas plus agréable !) que celle
de Madicte. Et comme toujours, je suis plein d’admiration pour ma femme !
Quel courage, elle est mon moteur, ma motivation. Sans elle, je ne sais pas si
j’aurais été aussi loin dans ma revalidation. Je me rappelle qu’à Pellenberg je
m’étais fait une image mentale : quand je regardais l’horloge dans la
salle de kiné, je voyais juste à côté le visage de Madicte. Lors de moments
difficiles, douloureux, un regard vers l’horloge me poussait à continuer !
Elle me dit qu’elle m’admire, qu’elle me trouve courageux ; je n’en sais
rien… Je pense qu’ensemble nous voyons la Vie autrement, et que nous avions en
nous cette manière de voir la Vie depuis longtemps. Cela ne veut pas dire que
tous les jours sont roses et faciles.
Souvent les gens entendent qu’il est plus important d’être plutôt que
d’avoir… Nous nous efforçons d’appliquer cet adage: nous disons alors que nous
n’avons pas de problèmes… nous sommes les problèmes !!!
Voilà, je suis au bout de mon texte. Merci à TOUS et TOUTES ! Sans
vous ce serait plus difficile…
Quelques beaux morceaux choisis sur Youtube :
Mauranne et Catherine Lara, Sur un prélude de Bach
Catherine Lara, Comme s’il y avait un peu de craie dans l’encrier
Françoise Hardy et Julien Clerc, Fais-moi une place
Joan Beez, Cry me a river
Amazing Grace
Gracias a la Vida
Suzanne
Les quatre derniers titres enregistrés lors du Festival des vieilles
charrues
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