Voilà… c’est fait, c’est fini. L’opération s’est bien passée, le Professeur
est content. Le patient aussi ! Je suis surpris par ma sérénité avant
l’opération, pas d’angoisse ou de panique. Il y avait de la résignation mais
aussi une volonté d’aller de l’avant, sachant ce qui m’attendait quand on m’a
annoncé que sans cette opération je finirais tétraplégique. Mon bras gauche
était déjà sur le déclin, sans parler des douleurs dans la nuque. Voilà donc,
si pas une épine hors du pied, à tout le moins un drain dans la colonne
vertébrale.
A nouveau nous nous sommes retrouvés dans une situation bien connue :
Madicte seule à la maison, croulant sous les nouvelles démarches administratives
qui arrivent comme les inondations en cette saison. Seule avec les idées qui
tournent dans sa tête : elle me voit souffrant sur mon lit, nuit et jour,
impuissante à diminuer ma douleur. Et moi de mon côté, bien entouré, chouchouté
par les anges en blanc. Les premiers jours ont été très douloureux ; je
n’ai de ma vie jamais avalé autant d’antidouleurs et de médicaments. J’ai dû
rester les trois premiers jours complètement à plat sur le dos, sans pouvoir
bouger, tirer ou pousser sur mes bras. C’est long, trois jours !!! Puis
mon infirmière a commencé à me redresser prudemment. Quelques étapes bien
pensées jusqu’à m’amener assis au bord du lit pour faire ma toilette. Puis j’ai
pu dormir sur le côté, ça fait du bien.
Me retrouvant en clinique, j’ai revécu certaines sensations, ce que l’on
pourrait appeler des « déjà
vu » :
-les tranches de pain emballées dans le cellophane
-les barres froides en inox du lit
-un bracelet au poignet, pour m’identifier en cas de perte ou pour
identifier mon cadavre
-les bruits du couloir, typiques d’un hôpital. Etant bloqué dans mon lit,
je ne sais ni ne vois rien de ce qui se passe à l’extérieur de ma cellule.
-une très gentille dame qui est venue m’apporter la communion dimanche.
Avec juste une parole « Je ne suis pas digne de te recevoir, mais dis
seulement une parole et je serai guéri ». Nom di djo ! quand je serai
Pape, je changerai ça !!! C’est quoi ça ? Nous ne sommes pas dignes
de Dieu ? Et dans le même temps nous proclamons que Dieu est Amour. S’il
nous aime et que nous ne sommes pas dignes de cet Amour, je propose de fermer
la boutique : il travaille pour rien… J’ai quand-même des difficultés avec
« ma » religion !
Tiens, une différence avec Pellenberg : ici les chambres ont un
crucifix ! Je me souviens d’une conversation à ce sujet avec un
responsable de Pellenberg. On avait supprimé les crucifix parce qu’ils
choquaient certains patients non croyants, ou juifs ou musulmans… Mais nom de
Djeu, un établissement, une institution qui se dit chrétienne, qui soigne tout
le monde en s’efforçant, dans la manière d’attribuer les soins, de respecter
certaines traditions, certaines croyances propres aux patients, peut quand-même
afficher son orientation philosophique! Le crucifix n’est pas une injure
que l’on crache à la figure des patients ! Il ouvre ses bras en signe de
bienvenue ! On ne ressort pas infecté d’un local où il y a un crucifix me
semble-t-il. Pourquoi s’effacer, gommer ce que l’on est « en signe de respect
pour les autres » ? Ne peut-on les respecter en restant ce que l’on
est ? Il est loin le temps où la Chrétienté avait aussi comme objectif de
convertir un maximum de personnes « engagées sur la mauvaise voie ». Quand
viendra le temps de supprimer le mot « saint » du vocabulaire ?
les noms de villes, de villages, de lieux-dits vont finir par se voir raboter.
On a déjà transformé les noms des congés scolaires, qui étaient trop à
consonance religieuse. Le congé de Toussaint est devenu le Congé d’Automne (congé
d’automne qui est fixé en fonction d’une fête chrétienne… et d’une
commémoration plus universelle – le jour des morts). Le congé de Noël est
devenu Vacances d’Hiver (mais dont les dates sont fixées en fonction d’une fête
chrétienne ET d’une fête laïque – Nouvel An) ; qui plus est Noël n’est pas
le nom de la fête chrétienne, c’est la Nativité, Noël s’adressant à tout le
monde. Le congé de Carnaval a lui fait les frais de cette rage de tout
laïciser : il est devenu congé de … (oublié) alors qu’il n’a jamais été
nommé en fonction de la célébration chrétienne qui se situe en son milieu. Le
congé de Pâques est devenu Vacances de Printemps. Printemps… ah ah ah !
même quand la date du printemps n’est pas comprise dans le congé ! La date
de Pâques peut varier: après différentes tentatives d’unification, les
chrétiens ont choisi de fixer (si l’on peut dire) la date de Pâques au dimanche
qui suit la première pleine lune du printemps (ce qui rend la date de Pâques
très variable: entre le 26 mars (1989) et le 23 avril (2000)!! ). Le congé de "ex-Carnaval"
commence donc 47 jours avant cette date mobile.
L’idée de tout laïciser devient surtout une obsession de faire table
rase ! Si on change les noms des congés, mais que les dates des mêmes
congés ne changent pas, c’est un peu risible.
Mais je m’excite un peu trop ! Je n’avais pas pris mon clavier pour
vous parler de ça…
J’en reviens à notre vécu… Quand je suis à la maison, je vois bien comme je
suis limité physiquement. Quand je suis au lit, il m’est difficile de me
tourner sur le côté pour donner un bisou à Madicte, ou lui faire un câlin. D’où
frustration ! Se blottir l’un contre l’autre nous manque à tous les deux,
la tendresse est en manque. Je me dis parfois qu’il y a des situations injustes
dans la Vie : il m’est plus facile d’avoir des contacts avec notre chat
sur mes genoux qu’avec Madicte. A travailler, tout peut changer !!!
Ce mercredi, je rentre à la maison : YOUPIE ! Il y aura du
boulot… On a un peu étiré et déplacé certains muscles du dos, il leur faudra du
temps pour retrouver leur taille normale et leur place… Je ne sais pas encore
rester plus d’une heure dans ma chaise.
Comme j’ai hâte de revoir le jardin, de m’endormir auprès de ma douce. Ce
n’est que l’ordre chronologique, hein ! Je ne vais pas rentrer, me mettre
au lit et le soir aller voir le jardin !
J’avais une liste de titres à retrouver sur Youtube, mais elle est restée sur
mon bureau ; ce sera pour une autre fois.
Le mot MERCI est vraiment celui qui revient le plus souvent. Merci la Vie,
merci les familles, merci les amis ! Vous êtes présents, vous nous
soutenez ! Pas un jour sans un signe !
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