jeudi 2 juin 2016

Faut pas gonfler Gérard Lambert quand il répare sa mobylette





Me revoici. Le silence des derniers mois a été provoqué par divers facteurs. Depuis novembre/décembre, j’ai vraiment régressé physiquement, et le mental a suivi le même chemin, avec un peu de retard. Infections, inflammations musculaires, hernies discales (cervicales), je me sentais handicapé en rentrant à la maison il y a un an, maintenant je me sens cassé !!! Plus d’énergie, plus d’exercices physiques.
Le décès de papa a aussi modifié notre quotidien ; je n’allais pas parler de moi et de mes petits bobos dans ces circonstances. Puis l’actualité (attentats) m’a aussi donné le même sentiment: parler de moi, suite à ce que le pays vit me laissait un poids désagréable sur le cœur. Cependant la Vie continue, et j’aime ce moyen de communiquer. Pour ne pas trop m’attarder sur ce qui ne va pas trop bien, je vous laisse une série de minis cartes postales: mes « premières fois ».
Il y a 23 mois, je me payais un accident de la route… (en fait, non: il m’a été offert !) Je repensais il y a quelques jours à tout le travail effectué depuis le 12 juin 2014. Il y a eu plein de « première fois ».
Durant la revalidation, il y a eu une quantité incroyable d’étapes franchies, de petits pas vers une autonomie, vers une guérison, vers un progrès. Parce que je le voulais évidemment, malgré mes limites physiques, mais aussi parce que des équipes d’anges gardiens m’entouraient : ergos, toubibs, kinés, infirmières, profs de sport, de chaises roulantes, psy, … Et je n’oublie pas les encouragements de Madicte, des enfants, de la famille, des amis.  Des premières fois, il y en a eu !!!
Ce n’est pas la première fois, dans l’ordre chronologique, mais c’était un moment important :
Quand j’ai reçu ma première chaise roulante : Pouvoir me déplacer assis, voir autre chose que les plafonds, arriver dans la salle des kinés et découvrir le paysage par les grandes fenêtres, depuis le sol jusqu’au ciel (j’ai demandé à rester quelques minutes face à la vue qui s’offrait à moi).
Le jour-même, ou le lendemain, la première fois que Leen, une infirmière, m’a conduit à la chapelle de Pellenberg ! Elle m’a allumé une bougie sur l’autel, m’a laissé là en disant que je n’avais qu’à prendre le temps que je voulais et qu’elle me reconduirait après dans ma chambre. Je ne l’ai découvert qu’en voulant quitter les lieux : elle était assise dans le fond de la chapelle. Elle m’attendait.
La première fois que j’ai su me laver les deux mains au lavabo !
La fois où j’ai reçu une chaise électronique (chaise électrique, ça fait un peu euthanasie …) : quel sentiment de liberté !
La première fois que j’ai suivi le cours de chaise roulante: panique à bord !
La première fois que j’ai su dévisser le bouchon d’un tube de dentifrice.
La première fois que le prof de chaise roulante m’a félicité.
La première fois que je suis resté 15 minutes assis sans tomber dans les pommes.
La première fois que je suis rentré à la maison.
La première fois que je me suis transféré seul de la chaise au lit.
La première fois que j’ai eu droit à une douche. C’était à Pellenberg, un dimanche matin particulièrement calme, près de deux mois après l’accident. Deux infirmières sont venues me proposer de prendre une douche. C’était tellement agréable que j’ai demandé trois shampoings à la suite l’un de l’autre ! Elles avaient le temps, et voulaient me chouchouter…
La première fois que je suis sorti avec ma chaise électronique avec Marco, l’ergo, pour faire un tour du bâtiment, et apprendre les subtilités de certaines manœuvres.
En parlant de chaise roulante… Ma première chaise « active », une vieille chaise qui devait avoir été refusée au contrôle technique en Tunisie (petit clin d’œil à mes amis tunisiens), une chaise qui n’était pas à ma taille… mais qui me donnait l’impression de me mouvoir seul ! Je vois encore le regard pas très rassuré d’un de mes anges gardiens quand j’ai pris l’ascenseur tout seul.
La première fois que Madicte a dormi avec moi à Pellenberg ! Les pensionnaires qui logeaient là le WE pouvaient « apporter leurs tartines ». Je les vois (pas mes tartines, les infirmières !) m’expliquer qu’on allait m’apporter un lit supplémentaire dans la chambre. Je me demandais si elles me taquinaient…
La première fois que j’ai été manger le repas de midi dans la salle commune (quand je mangeais en tapissant vêtements et sol de nourriture, je préférais rester seul dans ma chambre): les mots et les cris d’accueil des mes voisins de rue… Qué bonheur !
La première fois que j’ai rencontré Olivier, mon sauveur ! Il terminait sa garde du nuit à Beauvechain et, avant de rentrer chez lui, il voulait me visiter. Il était là vers 8.45 h dans le corridor (ma rue). Les infirmières lui ont dit que je devais d’abord avoir fini ma toilette. Il est resté calmement à attendre pendant 45 minutes… Quand il est entré, j’ai d’abord vu son uniforme. J’ai cru que c’était notre Frédéric qui venait me voir, bien qu’étonné de le voir en uniforme. Puis j’ai vu son visage ! Quelle émotion non di djo !
La première fois que j’ai pu porter ma main droite à la bouche avec une cuiller, sans rien renverser !
La première fois que j’ai eu une chaise roulante active à ma taille (merci Docteur Kiekens ! Les nouvelles chaises étaient dans la cave, mais ne pouvaient servir tant qu’elles n’étaient pas immatriculées. Un coup de gueule et l’affaire était réglée) : légèreté, souplesse, maniabilité, …
La première lettre que j’ai écrite à Pellenberg. Ecriture d’enfant, pleine de vibrations, irrégulière, incertaine. Mais accompagnée de cette envie d’écrire, de recommencer « comme avant », de dire des choses personnelles.
Mon premier retour à l’école à LLN ! L’accueil des enfants, des collègues ! WAOW !

Mais il y a aussi eu des premières fois moins agréables :
Ma première chute pendant le sport. Une marche arrière un peu trop rapide, sans les roues « anti bascule ». Le choc de ma tête sur le sol a été assez fort, puisque les gens dans la salle voisine sont venus voir ce qui se passait.
Ma première (et unique) chute hors du taxi (il n’y a pas si longtemps j’ai eu la confirmation: ma chaise était sur le plateau, à 60 cm du sol). Solide, la caboche ! Mais quelle inquiétude : j’entendais les gens, et je ne savais pas répondre ! Je paniquais intérieurement à l’idée de ne plus savoir parler !
La première fois (la seule jusqu’à présent) où je suis tombé du lit, tout seul comme un grand (en voulant remonter la barrière, vous savez, celle qui empêche de tomber du lit).





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