jeudi 2 juin 2016

Deux mois de silence...



Deux mois de silence depuis notre hommage à papa.
Deux mois avec des hauts et des bas, des marées hautes et basses qui se succèdent, des émotions qui nous bousculent et nous obligent à nous tenir à la main courante de l'amour et de l'amitié pour ne pas perdre pied et se retrouver par terre comme une tortue sur le dos, battant désespérément l'air de ses pattes.
Souvent je me sens l'âme d'un clown triste, le cœur d'une chtroumpfette qui a le blues.
Quand mon homme n'a pas la forme, je m'arrange pour le faire rire de toutes mes bêtises dès le réveil. Heureusement qu'il n'y a pas de caméras ou de micros cachés, car je risquerais d'être envoyée illico presto chez les foldingues! Notre hilarothérapie reste efficace. Nous essayons de transformer nos petits malheurs en moments de complicité joyeuse et déjantée.
Quand les temps sont parfois durs, on se dit qu'on a de la chance que ça aurait pu être pire et on s'évertue à trouver tout ce qui marche (aïe, le mot est mal choisi) encore...
J'ai pris l'habitude de m'attendre au pire, ainsi je suis toujours rassurée en voyant que tout compte fait la situation est moins grave et moins désespérée.

Bonne nouvelle, en ce qui me concerne, j'ai pu me débarrasser du port-a-cath qui me squattait depuis plus d'un an et demi. Devoir repasser sur le billard ne m'enchantait guère et me stressait, mais c'était mon choix d'en finir avec cette souris sous-cutanée qui perturbait mon sommeil et me rappelait sans cesse les joyeusetés des traitements chimiothérapiques. 
Intervention chirurgicale sous anesthésie locale et contrairement au moment de la pose où j'étais dans un brouillard total, ici sans sédation (on trouvait que j'étais assez paisible ).  Je ne vous dis pas, à part l'image j'ai eu droit aux sons et aux odeurs... Alors que j'entendais les bavardages entre le chirurgien et son assistante, à un certain moment j'ai cru reconnaître l'odeur de roussis des dernières plumes des ramiers que mon père, rentré de chasse, passait au-dessus de la flamme de la cuisinière.  Comme l'alarme incendie ne se mettait pas en route, j'ai demandé ce qui était en train de cramer ainsi. Le chirurgien a cru me rassurer en me disant que c'était la cautérisation de la plaie interne.  C'était donc moi qui jouais le rôle du ramier... Evidemment ce n'était rien au regard de ce que Jeanne d'Arc a dû sentir....
Comme on ne m'avait pas mise sous sédation, j'ai gardé mes esprits pendant toute l'intervention et j'ai pu rentrer rapidement à la maison, ramenée par un de nos multiples anges gardiens qui veillent sur nous. (au fait, c'était une ange, mais la langue française a décidé que le mot ange est masculin. Enfin, ça ne sert à rien de discuter du sexe des anges, moi je sais qu'il y en a des masculins et des féminins et ce jour-là il y en avait une quarantaine qui m'ont envoyé des mots doux pour me tenir la main et m'aider à rester paisible. Merci les anges, vous ne vous doutez pas à quel point vous nous aidez à garder le cap!
 D'autres nouvelles? Contrairement à l'adage "pas de nouvelles, bonne nouvelle", nos silences cachent parfois sous un voile pudique le combat inégal que nous menons contre les difficultés physiques, psychiques et matérielles qu'il nous faut affronter.
C'est plus facile d'en parler quand on arrive à nouveau à sortir la tête de l'eau que lorsqu'il nous faut un tuba pour arriver à respirer encore. De toute façon, on ne parle pas la bouche pleine et avec un tuba, y a pas moyen ...
Le bulletin médical de Pierre n'a pas été brillant ces derniers mois. Oui, évidemment, les méchantes langues diront qu'en tant qu'élève autrefois les bulletins c'était pas vraiment son fort, mais ici on ne peut pas dire qu'il ménageait ses efforts pour avoir de bons points. Ses scores en tension artérielle sont trop élevés (là il fait du zèle), les analyses des urines indiquent depuis des semaines une infection que les antibiotiques n'arrivent pas à circonscrire (là il fait preuve de bcp de persévérance), en même temps il souffre d'inflammations musculaires au bras gauche et d'hernies discales aux vertèbres cervicales qui avaient été fracturées lors de l'accident (il excelle dans tous les domaines, il ne fait pas les choses à moitié).  Avec des remarques pareilles ses parents auraient été fiers de lui. Bref, trêve de plaisanterie, c'était dur dur et le moral a accusé le coup. Je l'ai emmené à l'insu de son plein gré (pas vraiment) à la mer, début avril et aussi la semaine passée. Comme toujours, notre mer nationale nous a redonné courage et énergie. Petit à petit Pierre a repris du poil de la bête, mais sa calvitie est restée inchangée.
Les rendez-vous et examens médicaux se succèdent: Urologie, cardiologie, radiologie, neurologie, neurochirurgie...  On le passe à toutes les sauces... Moi je me contente de l'oncologie, c'est un menu plus rodé et plus espacé.  
Pour ce qui est des surprises on a aussi été gâtés: quand Emilie et Jan sont allés passer quelques jours dans notre abri côtier à l'Ascension ils ont eu les pieds mouillés.  Normal, direz-vous, à la mer on prend des bains de pieds.  Oui, mais, c'était pas sur la plage, mais bien sur notre parquet en arrivant dans notre appartement au cinquième étage ... Les nouveaux propriétaires du sixième ont engagé un entrepreneur pour rénover leur appartement. Paraît que les ouvriers causent russe (ou causent casse) .  En tout cas ils ne savaient pas que lorsqu'on retire des radiateurs, il faut mettre des bouchons aux canalisations. Comme leurs voisins de gauche avaient leur chauffage qui manquait de pression, le chauffagiste a rempli le circuit qui ne semblait pas pressé de se remplir.  Logique puisque c'était la chape du sixième et notre plafond qui se transformaient en vase d'extension. Les gaines des plafonniers du living et de la salle de bains ont servi de relais pour transformer notre appartement en aquarium marin.  Non, je rigole, les crevettes n'auraient pas pu s'y balader, mais bon, on aurait pu se passer de ce genre de soucis. Evidemment, ce n'est qu'un dossier de sinistre de plus ou de moins à régler avec les assurances, on n'est plus à ça près... C'est devenu mon passe-temps favori (rien que d'y penser, j'ai mon coeur qui se met à battre plus fort).   Mais à part ça, tout va très bien, Madame la Marquise. Ah oui, on déplore un petit rien, une petite fuite au nouveau plafond de notre chambre à coucher à la maison suite aux violents orages du week-end passé. Heureusement on est venu réparer le toit hier, avant que le village de Zepperen ne se retrouve sous eau cette nuit. On a eu de la chance, contrairement à d'autres personnes du village dont la maison a été inondée.  L'eau n'a pas dépassé notre boîte aux lettres. Vous voyez, nous on est des vrais chançards, il y en a toujours qui ont plus de poisse que nous! Non, mais, de quoi on se plaindrait?

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