mercredi 8 février 2017

Quel homme, mon homme!




Mon admiration pour lui est sans fin ni faille.  Je me demande souvent où il trouve tant de courage et de force pour continuer d'aller de l'avant sur son chemin qu'il parcourt sur des roues mais qui ne va pas toujours sur des roulettes.  Jamais il ne se plaint, toujours il a le mot pour rire. Parfois je me sens presque gênée lorsque j'ai le cœur gros et le moral couleur blues.
Vous n'imaginez pas comme nos conversations peuvent être parfois scatologiques et vous imaginez encore moins notre soulagement quand sa vessie a pu se vider dans les délais normaux sans qu'il faille envisager un passage aux urgences de l'hôpital du coin. Nous bénissons les inventeurs des protections et des sondes urinaires.  Alors que certains discutent du dernier modèle d'une marque de voiture, nous nous réjouissons de la parution sur le marché d'un nouveau modèle de sonde et nous espérons que celle-ci donnera entière satisfaction (lisez: qu'elle permettra de vider la vessie sans devoir essayer 5  fois avant que ça ne marche.) Nous nous retrouvons dans une situation analogue à celle des jeunes parents qui sont ravis de voir leur progéniture se soulager dans le pot.  Nous, nous lançons notre cri de victoire et de soulagement "YES" quand Pierre brandit joyeusement son sac gradué gonflé de son cru.
Nous essayons de rire de tous ces sujets qui nous stressent parfois et dont nous savons que ça sera comme ça pour toujours.  L'autodérision c'est vraiment un bon remède anti-déprime.  Heureusement que nous avons une réserve suffisante de gants médicaux et une bonne machine à laver pour gérer tous les débordements incontrôlés...

Demain je retourne à l'hôpital pour mon x ième contrôle oncologique.  La dernière fois c'était en octobre avec toute une batterie d'examens, cette fois-ci c'est de la routine, juste une prise de sang et un rendez-vous avec l'oncologue.  Ça semble tellement anodin et pourtant je n'aime pas devoir y passer. Penser au fait qu'il faudra reprendre ce chemin qui mène au labo, puis aux couloirs de l'hôpital de jour où ont lieu les chimiothérapies, ça me donne une boule au ventre. C'est comme si je ressentais à nouveau ce goût infect dans la bouche, les nausées qui m'envahissaient. Je ne supporte plus de voir des glaçons colorés à sucer comme ceux qu'il fallait prendre au moment où la chimio rouge s'engouffrait dans mon port-a-cath.  Je sais, tout ça c'est fini, c'est déjà loin et pourtant ça s'est imprimé dans mon corps comme une mémoire cellulaire.   
J'ai décidé que j'étais guérie et la toubib n'a pas intérêt à me signaler qu'il y a de nouveau un problème....
J'ai du mal à me réapproprier mon corps, j'ai l'impression qu'une partie de moi à foutu le camp. C'est comme si une partie de ma force vitale s'était évanouie. La fatigue rode si souvent et elle m'enlève l'envie d'être active. Tout devient effort et décision. Ces dernières semaines les infections se sont succédé et j'ai dû accepter à deux reprises un traitement aux antibiotiques.  
J'ai repris ma guitare en main, question de refaire des choses que j'aimais.  Tout est encore très loin, mais ça me fait du bien. J'aspire au printemps, je sais pourtant que ce n'est que la Chandeleur qui s'est pointée la semaine passée.  Et hop, Pierre en a profité pour faire quelques crêpes au prix de contorsions pénibles devant notre cuisinière.
Il est incroyable, cet homme!!!
J'en ai parfois assez de devoir penser à tous nos dossiers administratifs  à gérer; tous ces comptes d'apothicaires à tenir pour en exiger le remboursement par les assurances. Ne pas savoir si monsieur l'expert de la contrepartie (l'assurance du type qui a foncé sur Pierre et qui s'est dit victime d'avoir été heurté pendant sa manœuvre par un motard qu'il n'a pas vu venir) va se décider de réagir au dossier adaptations de notre appartement à la mer et s'il va encore oser contester l'adaptation de la cuisine, car :"On peut se poser la question de savoir si M. de Tender doit pouvoir cuisiner dans son logement de vacances". (sic).  Entretemps les travaux avancent et les meubles de la nouvelle cuisine sont installés.  Par internet on peut suivre le dossier et voir les photos de l'appart qui se transforme. Non, je ne regrette rien.  Si on avait dû attendre le feu vert de cet expert qui n'a jamais mis les fesses dans une chaise roulante, Pierre continuerait dans notre appart de devoir dormir dans le couloir et d'être lavé dans son lit. Mais rassurez-vous, cet expert ça ne l'empêche certainement pas de dormir de nous faire poireauter pendant des mois et de nous obliger à utiliser nos propres fonds.

Je pense souvent aux personnes qui se retrouvent ainsi, victime d'un accident, d'une maladie, ou d'un AVC et qui doivent faire face à tant de nouveaux besoins matériels. Certes, il existe des organisations officielles qui aident, mais si elles n'ont pas un propre bas de laine de réserve cela peut avoir des conséquences dramatiques. Nous avons "la chance" que l'accident de Pierre a eu lieu sur le chemin du travail, qu'il continue à toucher son salaire, qu'il n'a aucune responsabilité dans cet accident et que les assurances doivent intervenir (on ne sait pas quand, mais ça viendra un jour).  Comme on l'a souvent dit, on est de vrais veinards!!!  Merci la vie de nous avoir épargnés de ces problèmes-là!

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