dimanche 24 décembre 2017

Heï Benek Heï Blavek


Me revoici, cette fois avec quelques cartes postales uniquement. La première est une très bonne nouvelle :

-        Nous avons eu une rencontre chez l’expert judiciaire et, enfin, il y a (presque) un accord entre les parties, en ce qui concerne les remboursements et les dédommagements. L’expert doit rédiger son rapport maintenant, puis ce sera le rôle du Tribunal(si j’ai bien compris car mon Gouvernement me signale, à la relecture de ce texte, que si les parties tombent d’accord, on n’ira pas au Tribunal). On ne voit pas encore le bout du tunnel, mais on nous a rétabli le courant et la lumière dans le tunnel !

-        Je suis passé à Pellenberg il y a quelques jours et suis allé voir les nouvelles installations de revalidation (kiné, ergo, sport,etc…). Je me suis alors souvenu que lors de ma revalidation il y a un an on avait mesuré la force de mes poignets en arrivant fin novembre (main gauche : 15, main droite : 25), puis à mon départ en janvier (main gauche et main droite : 30). J’ai demandé s’il était possible de remesurer ma force, ce qui a été fait : main gauche 55, main droite : 60 !!! Je ne sais pas si cela se mesure en Joules, en Kilos, en Watts, en Caramels… mais c’est assez impressionnant.

-        L’effet papillon, vous connaissez ? Une carte postale remplie d’odeurs agréables, surtout à la fin. Nous avons eu une drôle de blague à la maison : Madicte se rendait au congélateur pour y prendre de quoi nous sustenter et constata que l’un des congélateurs était éteint. A l’intérieur, certaines denrées étaient encore bien dures, mais d’autres avaient sérieusement dégelé. Notamment des truites qui avaient pour ainsi dire retrouvé la souplesse de leur vivant. Première chose à faire : les cuire, puis on avisera. Une douzaine de truites, ça ne tient pas dans une poêle, donc Madicte les répartit dans plusieurs. Puis nous continuons à explorer le congélateur défectueux. Il y avait des fruits rouges avec lesquels nous avions (autrefois)  prévu de faire des confitures. Bon… On va s’y mettre ! Madicte aux casseroles, Pierre aux pots de confiture à nettoyer. Ah, mais… Pour nettoyer les pots de confiture, il faut de la place dans et autour de l’évier… Les poêles ayant servi pour les truites doivent être nettoyées et, tant qu’à faire, il y a la vaisselle de la veille. Pesée des fruits (10 kg), puis contrôle de la réserve de sucre : il nous en reste 2 kg. Zut, nous n’avons pas assez de pots non plus ! Une seule chose à faire : aller racheter du sucre, des pots et de la paraffine. Puisqu’on y est, faisons nos courses hebdomadaires également. Mais n’achetons pas trop : dans les jours à venir nous allons consommer certains produits fraichement dégelés qui ont déjà trouvé place dans le frigo. Oui, mais…. qui fait des confitures en cette période de Noël ? L’offre de pots vides est limitée dans les magasins. Nous avons donc raflé ce qu’il y avait de pots au rayon du Carrefour à Hasselt. Tant pis pour ceux qui ont aussi des confitures à faire en urgence. Alors… organisons-nous : où mettre les pots propres ? On va les mettre sur la table roulante. Où est-elle ? Ah oui : au garage, remplie de brols en tous genres. On va précieusement déposer les brols sur le sol, ok ? Mais attention, c’est provisoire hein ! Donc 10 kg de fruits, plus 10 kg de sucre, ça fait dans les 20 kg (à la grosse louche). Répartition des fruits dans deux casseroles (attention : veiller à un équilibre correct entre cerises, fraises et groseilles rouges dans chaque contenant), puis répartition dans d’autres casseroles pour hâter le dégel complet et la cuisson subséquente. Ca sent bon dans la cuisine, ça me rappelle des images d’enfance de Wasmes. On touille ! Aïe: le téléphone sonne, Pierre est au garage, c’est Madicte qui l’entend et va décrocher, appelant Pierre à la rescousse pour touiller. Les pots se remplissent. Ils refroidissent. Où va-t-on les mettre ? Ben… provisoirement sur la table roulante ! Le lendemain, visite d’un couple d’amis à qui nous racontons notre marathon. « Ah, mais si vous nous l’aviez dit… Nous avons des dizaines de pots vides à la cave, nous en parlions encore hier ! ». Je pense passer une annonce pour voir si personne n’a une armoire pour y mettre des pots de confiture, plutôt que d’aller en acheter une. Mais même si nous en recevions une, il faudrait faire de la place au garage !


-        Nous avons eu le bonheur d’assister à un concert dans la splendide salle octogonale de l’ancien séminaire de St Truiden. Une chorale venue d’Afrique du Sud, the Bloemfontein Chidren’s Choir. WAOW !!! Des jeunes de 8 à 18 ans, avec des voix qui m’ont soulevé hors de ma chaise. La dame qui les dirige a lancé cette chorale en 1987, avec la beauté de la voix comme unique critère d’admission. Pas de ségrégation liée à la couleur de peau, de critère de richesse. Une soirée trop courte, où ces jeunes nous ont revisité de grands classiques adaptés : Adiemus, Brel , Léonard Cohen, Mozart, Armstrong, Lennon, … Que du bon nom didjo !!! Pour accéder à la salle, il a fallu emprunter une chaise fixée sur un rail. C’était une première pour moi. Visiblement, ils n’ont pas ma taille : on aurait dit King Kong sur une chaise de Barbie !. Nous avions de très bonnes places au premier rang, mais je ne pouvais m’asseoir sur l’un des sièges, je suis donc resté dans le couloir entre les places des spectateurs. Jusqu’à ce qu’une dame vienne me dire que je ne pouvais pas rester là : les jeunes avaient besoin des couloirs entre les chaises pour leur chorégraphie. Donc déménagement, on me place « hors public », juste devant la scène, à un mètre des fesses de la dirigeante (on était à peu près à la même hauteur…, les fesses et moi). Mais très vite ce sont les enfants qui ont attiré mon attention. Dès le début je me retrouvais en pays de connaissance : ces visages, ces sourires, cet entrain, ce bigarrage de couleurs de peaux… Je me voyais à l’école ! Certains visages me rappelaient des visages d’élèves ; les enfants sont les mêmes partout sur la Terre ! Seul petit regret : je ne pouvais serrer la main de Madicte… Il y a des instants de magie où la complicité est très forte ! Il nous restait le regard pour communiquer nos émotions. Nous avons rejoué à King Kong et Barbie en partant… Une belle soirée ! La Vie est belle !

-        Madicte vient de partir rejoindre une copine. Je suis seul, face au jardin grisâtre. Le peuplier m’offre sa silhouette sur un fond de ciel gris. Mais dans cette demi-brume quelque chose bouge : en contre-jour je vois la silhouette d’un pic entrain de sculpter le bois… Il remonte dans l’arbre. La tête en haut, la tête en bas, il s’active. Ah, mais non, il ne sculpte pas : il cherche sa nourriture. Même dans la grisaille de ce début d’hiver, la Vie est là !

-        Je regardais sur Youtube des extraits d’un concert de Jean-Jacques Goldman. Il y a des moments forts, des moments d’humour. Parfois les caméras filment furtivement le public. On y voit la joie, le déchaînement des gens. On y voit à l’occasion des gens proches, un couple autant en harmonie avec la musique qu’en harmonie avec soi-même. Bouffée d’émotion : comme j’aimerais y être… Pourtant je ne suis pas à plaindre : quand j’y pense, j’ai eu souvent l’occasion d’assister à des concerts à Forest-National : Queen, Johnny Claig, Renaud, Paul Simon, Tracy Chapmann … Rien que du bon ! Avec aussi de bons moments de proximité, de complicité avec ma Madame ! J’ai vécu cela, je suis reconnaissant de tout ce que la Vie m’a donné. Mais parfois, une larme fait surface… Le passé est le passé, mais je reste quotidiennement confronté à ma situation. La douche accueille moins de larmes qu’il y a deux ans, mais l’émotivité est encore bien présente. Mais je sais qu’il y aura encore des concerts !

Je vais m’arrêter ici, ce texte sera lisible pour la nuit de Noël ! Nos vœux vous sont déjà parvenus, mais je profite du clavier pour vous re – souhaiter une très heureuse fête de Noël et une superbe année 2018 ! Merci à chacun et chacune pour ce que vous êtes pour nous ! Nous sommes courageux à l’occasion, mais avec vous nous sommes forts ! Je vois la force de l’Amour, de l’Amitié à chaque instant (vous pouvez vous reconnaître dans ces mots). Je vois combien Madicte se bat, déplace des montagnes pour nous, pour moi !  Allez, soyez fous !

mercredi 20 décembre 2017





« L’amour c’est la plus belle et la plus puissante des forces universelles,
capable de redonner vie à l’âme la plus meurtrie.
Soyons des prosélytes de l’amour, sans crainte de faire preuve d’excès de zèle. »
(Mohamed El Bachiri dans Un jihad de l’amour)
Nous vous souhaitons un joyeux Noël et une bonne et heureuse année.
Madicte et Pierre, Frédéric, Emilie et Jan





“Liefde is de mooiste en machtigste der universele krachten
die in staat is de meest gekwetste ziel terug tot leven te wekken.
Laten we bekeerlingen van de liefde zijn, zonder vrees voor overdreven ijver.”

(naar Mohamed El Bachiri in Un jihad de l’amour)

We wensen u een vreugdevol kerstfeest en een gezond en gelukkig Nieuwjaar.
Bénédicte en Pierre, Frédéric, Emilie en Jan

vendredi 24 novembre 2017

J’oubliais qu’tes tatouages et ta lame de couteau c’est surtout un blindage pour ton cœur d’artichaut.


Madicte, en publiant son dernier texte, m’a indirectement rappelé qu’il est temps de reprendre le clavier. Je ne sais pas en commençant ce texte s’il y aura de véritables cartes postales… Il y a davantage de partage de sensations, de sentiments, de ressenti et moins de tableaux …

Ces derniers mois, je prends tout doucement conscience que ce que je vis depuis plus de 3 ans, c’est pour le restant de ma vie. Je vois ce qui sera un jour une difficulté,  alors qu’aujourd’hui je sais le faire. Je vis au jour le jour, mais avec à l’occasion des flashes annonçant le futur. C’est une manière d’anticiper, de préparer l’avenir. Je pense à Bon Papa qui faisait partie de cette association « Les Invalides Prévoyants »… Ce que mon corps m’autorise à faire aujourd’hui, ne serait-ce que musculairement parlant, en aurai-je encore le capacité dans 15 ou 20 ans ? Une alimentation pas trop malsaine (avec Madicte je ne risque rien !), une activité physique correcte permettent d’anticiper, même de sauvegarder pour l’avenir. En pensant à tout ça, je n’ai pas d’appréhension, je prendrai ce qui viendra, je profite de l’instant présent.

Madicte est très attentive à ce que nous mangeons, elle vire progressivement vers le végétarien, ce qui est pour moi un pas plus difficile à franchir (déjà que les pas, en général, sont difficiles… mais vivre sans sanglier, sans steak, sans brochette, sans  blanquette de veau… j’vous dis pas). Je la taquine en parlant des graines, des légumes, du kéfir que nous allons manger jusqu’à la fin de nos jours.

Vivre dans notre maison est notre souhait à tous les deux et j’ai cru que nous arriverions à nous défaire de tas d’objets devenus inutiles, encombrants pour pouvoir vivre uniquement au rez-de-chaussée. C’est un challenge impossible. Je me sens entouré de brols, de choses, de trucs, d’objets qui n’ont plus leur place dans mon espace vital. Et je ne parle pas de tout ce qui a été bourré au grenier. Et je ne parle pas de nos livres toujours inaccessibles à l’étage, du matériel de camping qui encombre. Je ne parle pas de tout ce que nous avons gardé « au cas où », etc… Je n’ose penser à la maison de papa et maman qu’il faudra un jour vider. J’ai parfois envie de ranger, mais il n’y a pas la place. Alors j’ai envie d’évacuer, de bazarder, de donner. Mais mon gouvernement me demande d’attendre, d’essayer de vendre sur internet.  Que ce soit Madicte ou Pierre, nous manquons d’espace personnel. Madicte a son bureau, mais c’est un espace invivable à cause du bruit du garage juste en face. Lorsque le kiné vient mobiliser mes jambes, cela se fait dans notre chambre, sur le temps de midi, ou en début d’après midi, alors Madicte ne sait pas faire de sieste. Faire une sieste au living, avec les nuisances du garage d’en face c’est exclu. Faire une sieste au jardin, à l’ombre d’un arbre, c’est impossible : elle ne dort que dans l’obscurité… A l’étage, dans le canapé d’Emilie et Jan, c’est entrer dans leur partie privée, donc à exclure. Mon bureau est dans notre chambre, c’est là que j’écoute la radio, que je suis à l’ordinateur. Mais si Madicte vient se reposer, il faut fermer les rideaux, je dois mettre des écouteurs, ou quitter la pièce. Nous vivons cela assez bien , mais cela fait partie des désagréments journaliers. Une dernière adaptation de notre chambre nous a fait déménager un meuble vers le living, ce qui limite encore plus mon espace en ce lieu. Ce ne sont là que des petits exemples de notre quotidien. Un agrandissement de la maison est envisagé, mais les experts de la partie adverse freinent et ergotent tant sur des détails que sur des grosses sommes. Nous espérons que la désignation d’un expert neutre va faire avancer le dossier… dans combien d’années ?

Heureusement il nous reste l’appartement à Koksijde : là tout n’est qu’ordre et beauté, luxe, calme et volupté.  Dépouillement, simplicité, facilité. Point. Là Madicte se repose, se ressource. Comme elle vous l’a dit il y a quelques semaines, elle a arrêté son traitement et après 15 jours elle se sentait déjà mieux. Elle veut récupérer mentalement, elle veut penser à elle, s’accorder du temps, de l’espace, elle s’est remise à la guitare, et attend le jour où le piano trouvera place au rez-de- chaussée (si on trouve de la place !). A l’occasion, elle rejoint les copines pour une balade dans les bois. Elle a retrouvé la chorale.  Cela fait trop longtemps qu’elle s’efface au profit de l’urgent,  du quotidien, du «nous». Je sens qu’il est grand temps de relâcher la pression, j’admire comme ma Belle reste calme, sereine, souriante à mon égard ( je pense en premier lieu aux « accidents » dans le lange malgré beaucoup de précautions) en voyant les conséquences pour le surcroît de lessive. Je pense à tout ce qu’elle fait à ma place, dont voici une infime partie :

-charger et décharger la voiture quand nous nous déplaçons (une fois la voiture chargée, je ne sais plus y entrer…)

-prendre en charge la vaisselle et ranger dans les armoires à la cuisine (à la maison, je peux faire une vaisselle en 3 ou 4 fois, à cause de la position anti-ergonomique)

-repasser le linge propre (qu’elle a lavé)

-régler les problèmes administratifs, financiers, etc…

-préparer la majorité des repas

Madicte en ce moment a besoin de se retrouver, de ne pas devoir trop donner de son temps pour des visites, des déplacements, elle a besoin tant de vaquer à ses occupations que de prendre du temps pour son organisation. Elle évite les déplacements, elle est contente quand je fais les courses sans elle. Mais il reste tant de contraintes et elle n’arrive pas à récupérer physiquement. Ce que je prends en charge est insignifiant, mais je tiens à le faire !Tri des poubelles, un Colruyt ou un Delhaize à l’occasion, un passage au  parc à conteneurs, les achats de langes et autre matériel. L’un ou l’autre homebanking. Gérer mes rendez-vous médicaux, les kinés, … Je vois d’où je viens, ce que j’ai récupéré depuis ma revalidation, j’en suis fier mais je reste limité dans beaucoup de domaines, où Madicte doit suppléer.

 Assez d’états d’âme… du fond de la gibecière de ma mémoire, je peux encore imprimer quelques cartes postales :

Je peux rajouter un nouveau geste à la liste de ce que beaucoup ont fait pour me permettre l’accès à leur maison : nos dernières visites à droite et à gauche ont été l’occasion de découvrir que nos hôtes démontent certaines portes pour faciliter l’accès et la circulation dans leur maison. C’est sincèrement touchant de voir à quel point vous pensez à moi !

J’ai repris le sport, avec le groupe des gens « cassés ». L’ambiance y est vraiment bonne, chacun faisant ce qu’il peut, en fonction de ce que la nature lui donne encore. C’est bon de voir l’une ou l’autre personne se dépasser, améliorer ses records, dépasser ses limites. On s’encourage, on se félicite, on se taquine. Snif… la prof nous a annoncé il y a 3 semaines qu’elle changeait de boulot ! Elle était un peu comme dans le film « Intouchables » : LA motivation (elle est juste à côté de moi, pull rayé). Mais ses collègues sont tout aussi super et savent nous motiver.

Nous avons organisé un WE – jardin : une quinzaine de personnes ont fourni plus de 120 heures de travail ! Vive l’Amitié ! Vive la solidarité. Certain(e)s ont travaillé en groupes, d’autres en binômes, d’autres encore ont travaillé seuls. C’était du travail lourd et ardu ! Par après, nous avons entendu que d’autres personnes auraient bien voulu participer, mais elles n’avaient pas été invitées. Je pense que la prochaine fois, nous élargirons la liste ! Afin de donner du plaisir à davantage de gens !

Quand nous sommes à Koksijde, j’ai des kinés locales : deux adorables dames. A Zepperen, je n’ai que des hommes. C’est très différent. Il n’y a pas de hiérarchie, pas de préférence. Seulement les conversations avec des hommes sont différentes de celles avec les dames. Tous ont des points communs, mais il y a aussi des différences, des exercices différents, une approche personnelle, des connivences. Je ne voudrais me passer de personne !

Cette année scolaire, c’est la quatrième fois que je ne suis pas rentré à l’école, et c’est la première fois que je ne pleure pas. Les bons souvenirs refont surface. Je pense à certaines anecdotes qui se sont passées au cours de ma carrière. Des moments de pur bonheur :

-Avec une classe de 6ièmes, en 1984, nous apprenions la chanson de Marie Laforêt « Le premier bonheur du jour ». En très court, elle dit que le premier bonheur du jour, c’est un ruban de soleil qui caresse  l’épaule de son homme, puis s’enroule sur sa main. Le premier chagrin du jour, c’est la porte qui se ferme, la voiture qui s’en va. Et elle termine en disant que bien vite il revient et le dernier bonheur du jour, c’est la lampe qui s’éteint. Avant de chanter, nous avions parcouru le texte pour être certains d’avoir tout compris. A un moment je demande pourquoi il revient bien vite. Et dans le fond de la classe, enfoncé sur la chaise, le menton au niveau de sa table l’empêchant de tomber plus bas, les mains en poche, mon Dominique dit bien haut « Ben, s’y r’vient vite, c’est qu’y travaille à mi temps hein s’ieur ! ».

-Arrivant dans une classe de P5 P6, je vois que certains enfants sont fort occupés avec un objet que je ne distingue pas… mais il circule et fait beaucoup rire. Je demande alors si je peux aussi rire. Une fille m’apporte alors un préservatif ! Je lui demande d’où elle tient ça. Elle m’explique que sa marraine, qui est psychologue, a donné la veille une conférence sur le sida et qu’en fin de séance, il y a eu une distribution de préservatifs. Elle m’explique que c’est très solide, qu’on peut mettre beaucoup d’eau là dedans. Je lui demande si elle sait me montrer, ce qu’elle devait attendre avec impatience : elle fonce vers l’évier de la classe, « branche » l’objet et ouvre le robinet. Et ça se remplit… Je lui demande combien de litres on peut mettre. « Ah ben j’sais pas moi chuis pas psychologue ! »

-Dans une classe de P5, Olivier allait faire une élocution sur le lama. Olivier est très nerveux, il maîtrise mal sa respiration et a tendance à s’embrouiller, à inventer des mots, voire à inverser les syllabes. Il commence en disant que le lama est un mammifère. « Ouille, Olivier, tu emploies des mots très compliqués ! C’est quoi un mammifère ? » Quelque peu surpris par mon vide scientifique il me dit qu’un mammifère est un animal dont la femelle a des lamelles. Maintenant que je sais, je le laisse continuer. « Le lama vit dans la Corbeille des Andes ». « Olivier, c’est quoi la Corbeille des Andes ? ». Sans se laisser démonter par mon ignorance il dit que c’est une chaîne de montage. Le lendemain, sa maman est venue me trouver en me disant la fierté de son fils, qui a vu que je prenais des notes !

-Il m’arrivait, avec une classe dans laquelle il y avait une complicité extraordinaire, de taper ma tête contre le tableau en disant « Que je suis bon ! Que je suis bon ! » après avoir dit un bon mot ou après avoir fait un peu d’humour… Jusqu’au jour où les enfants, tous ensemble, après un bon mot, se sont tous tapé le crâne sur les tables en disant « Qu’il est bon ! Qu’il est bon ! ».

-Celle ci s’est passée bien avant l’affaire Dutroux. Pour respecter l’anonymat de la personne, qui doit avoir pas loin des 40 ans maintenant, nous l’appellerons Araignée et volontairement nous transformerons sa voix. Lors d’un moment de détente (en fait dans le rang en rentrant en classe…) Araignée dit à qui veut l’entendre qu’elle est deux fois vierge. « Ah, tiens… comment ça ? » demande l’adulte dont nous tairons le nom. « Ben c’est facile : je suis née en septembre, sous le signe de la vierge. Et puis ben, j’ai jamais fait humm heuu, enfin vous voyez s’ke j’veux dire ! ». De nombreuses années plus tard je croise Araignée en rue, devenue étudiante. Nous évoquons le passé, les cours où l’on riait beaucoup, on se remémore quelques souvenirs et je lui demande si elle est encore deux fois vierge. Sans hésiter elle me dit que non : elle a changé de signe zodiacal.

-Il y a les moments où l’on rit. Mais il y a les moments d’émotion : à la fin d’un cours, je vois quatre élèves traîner pour sortir et s’arranger pour rester en classe quand tout le groupe est parti. Ici je ne tairai pas les prénoms ! Voici Caterina, Giulia, Larissa et Emilie venir vers moi avec un carton à chaussures. C’était quelques jours avant le congé de Noël 2007, il y a 10 ans ! Elles m’offrent une crèche réalisée par elles, pour moi. Moment d’émotion, de bonheur. Cette crèche sert chaque année, elle m’a suivi à Pellenberg.
 

-Un jour, lors d’une journée de formation organisée par notre Inspectrice (Bonjour à toi, oh Lumière des Lumières !), l’Inspecteur Principal était présent. Pendant une pause, il nous partage avec humour combien sa femme est extraordinaire, combien elle entreprend alors que lui se sent tout petit à côté d’elle. Pour lui montrer que j’avais bien compris ce qu’il nous partageait, je lui rappelle cette phrase de Julos Beaucarne « Quand il y a une belle betterave, c’est toujours pour un laid cochon ». Visage décomposé et horrifié de notre Inspectrice… et éclat de rire de l’Inspecteur Principal !

Tant de souvenirs me mettent le cœur en joie, je sens que le positif me porte au quotidien. Et quand ça va moins bien, il y a Madicte, il y a vous qui êtes là pour me remonter le moral, pour m’écouter. Le rire et l’autodérision aident aussi, sans que ce soit une fuite : c’est un peu la pression de la casserole qui s’échappe.

Je suis aussi conscient de tous les petits riens qui font que mon quotidien se déroule le mieux possible, je peux me réjouir de beaucoup de choses :

recevoir une lettre , un mail, un sms, un p’tit (ou long) WhatsApp, apprécier la soupe préparée par Madicte, ou l’odeur du pain frais, un sourire échangé avec une autre personne en chaise roulante, le chat qui vient se blottir quelques minutes près de moi, le p’tit déj’ du dimanche partagé avec Jan et Emilie, rester deux jours sans ennuis de fuites dans le lange,  lire un peu le dos au soleil derrière la fenêtre, la complicité que j’ai avec beaucoup d’entre vous, un petit film sur Youtube, un regard de Madicte, sa danse du matin autour du lit, un coucher de soleil, …

Je vais m’arrêter ici, tout en vous redisant toute ma gratitude pour votre soutien, quelle qu’en soit la forme ! Nous avons cette chance immense de vous avoir près ou loin de nous !!!


jeudi 26 octobre 2017

Nouvelles différées du front féminin


9 septembre 2017

Me revoilà, face à la mer coiffée d’un ciel digne de Magritte.
Les vacanciers arpentant la digue, les enfants distraits fonçant en cuisse-tax, la gente canine arrosant tous les coins à sa portée, c’est pas tout à fait fini mais ce n’est plus l’invasion… En semaine, les cheveux gris et les cannes ont pris le relais.  Mon Dieu, nous voilà faisant partie du monde des pensionnés !!!

C’est la quatrième rentrée des classes que nous loupons.  Nous savons que nous n’en aurons plus. 

Je suis officiellement, irrémédiablement  pensionnée. En Flandre, au Ministère de l’Enseignement, on ne traine pas: convocation le 4 avril devant la Commission des pensions, décision sur place, confirmation écrite quelques jours après, entrée en vigueur de la décision le premier mai et paiement en règle fin du mois.  Au Sud du pays, on n’a pas le même sens de l’efficacité au Ministère : je vous passe le détail des convocations inutiles pour bien constater que Pierre n’est pas en mesure de reprendre son travail. En janvier on lui a dit qu’il serait  à nouveau convoqué en juin par la  Commission et qu’on le mettrait au plus tôt à la pension en décembre.  Il n’a toujours pas été convoqué par la Commission, il vient de repasser un x-ième contrôle en septembre de nouveau auprès d’un nouveau médecin qui découvre devant nous le dossier et nous refixe rendez-vous en octobre parce qu’il n’a pas vraiment le temps d’étudier la question à fond.  Enfin, on va vers une consolidation et la détermination des séquelles définitives liées à l’accident justifiant une mise à la pension anticipée.

Le premier week-end de septembre nous avons accueilli mes compagnes ex-cancéreuses avec qui j’ai partagé le voyage au Portugal au  mois de mai. Que de joyeuses retrouvailles ! 
Toutes nous avons vécu cette traversée du désert, cette épreuve décapante de la maladie qui nous laisse meurtries, mais plus riches de compassion et d’amitié. Sœurs du même combat, nous nous comprenons d’un regard. Pas besoin de se dire l’enfer qu’il faut traverser pour sortir de la maladie.

Récemment on parlait dans les médias flamands de la difficulté des « rescapés » du cancer de se retrouver une santé et un rythme « normal » de vie. La société ne tient pas suffisamment compte des difficultés physiques et psychiques qui perdurent une fois qu’on est sorti de la grosse artillerie médicale.

Il est difficile d’exprimer aux personnes qui vous disent que vous avez l’air en forme, qu’au fond vous ne vous sentez pas vraiment en forme.  Ce n’est pas parce qu’on n’a plus de chimios à supporter que le traitement est fini.  Les cheveux ont repoussé, on essaye de se remplumer, de faire bonne figure.  Les contrôles s’espacent un peu, on a plein de « bobos » récurrents, mais on n’a même plus envie de les énumérer à l’oncologue qui se veut rassurant en disant que les analyses sanguines ne révèlent rien d’alarmant.  Quand on signale qu’on se sent parfois déprimé, on apprend que cela fait partie des nombreux effets secondaires du traitement antihormonal que vous devez vous tapez pendant cinq ans minimum. Comme seule remède on vous propose un antidépressif.

C’est merveilleux, les chiffres de rémission du cancer montrent une belle courbe, mais à quel prix ?
« On n’a plus le cancer, de quoi se plaindrait-on ? »
J’ai l’impression d’être passée par une moulinette, je ne sais pas dans quelle mesure mon corps retrouvera sa résistance, je constate que dès qu’il y a un microbe dans le coin, il est pour moi.  Moi qui ne prenais jamais d’antibiotiques, j’ai dû en faire quatre fois une cure en moins d’un an pour diverses infections.
Ma fatigue est chronique, tout déplacement important est un effort à fournir. Il faut chercher l’équilibre entre une vie sociale nourrissante et le respect des limites physiques  qui ne sont pas comparables à celles d’une personne de mon âge en bonne santé.

Quand je demande à l’oncologue le temps que durera certains effets secondaires des traitements, elle ne peut me donner de réponse.  Elle dit que les gens avec le temps semblent moins se plaindre. Si je suis comme eux je sais que c’est parce que ça ne sert de toute façon à rien.  Je n’ai pas le sentiment d’avoir vraiment le choix.  Arrêter ce traitement antihormonal  est faire un geste de résistance qui, si  on en croit les statistiques, pourrait se solder par une rechute.  Personne n’a envie d’avoir le cancer, et je vous assure que ceux qui sont passés par là ont encore moins envie de repasser à la casserole.
Tous les traitements que j’ai subis après mon opération étaient « préventifs », le cancer avait été éradiqué par l’ablation de mon sein. Mais on ne pouvait prendre de risques, donc on a sorti la grosse artillerie « met alles erop en eraan » comme on dit chez nous.  Le traitement antihormonal est une bagatelle par rapport aux chimios et à la radiothérpie.  Ce n’est qu’une petite pilule à prendre tous les matins. Mais quand on vous la prescrit, on ne vous dit pas à  quel point elle est toxique pour le foie, à quel point vous allez « profiter » pleinement de tous les symptômes de la ménopause et d’autres bobos « négligeables » en regard du monstre qu’est le cancer (fatigue, douleurs articulaires, infections urinaires récurrentes, etc.)

Nombreuses sont les femmes qui en cours de route finissent par abandonner ce traitement, tellement il est pénible à supporter pour elles, mais aussi parfois pour leurs proches qui en sont les victimes collatérales lorsque les changements d’humeurs deviennent récurrents.
J’avais désappris à lire les notices accompagnant tous les médicaments qu’il me fallait prendre, tellement elles étaient dignes d’un film d’horreur.  Je me souviens d’une injection qu’il fallait me faire après certaines chimios pour permettre aux globules de se régénérer plus rapidement. Il y était mentionné parmi les effets possibles le développement d’une leucémie…  Evidemment, c’est comme gagner au Lotto, il y a peu de chances que cela vous arrive… et là, on espère ne pas faire partie des « heureux » élus.

Me préparant à un gros contrôle le 12 octobre et voulant négocier avec l’oncologue le remplacement de mon traitement antihormonal « poids lourd » par un traitement moins toxique, j’ai quand même parcouru pour la première fois la notice du médicament que je prends depuis mars 2015.
Je vous épargne de la liste joyeuse des effets secondaires, très fréquents, fréquents, peu fréquents, exceptionnels, mais je peux vous dire que je fais partie des 10 sur 100 «  gagnantes » de la plupart des effets fréquents. 

26-10-2017

Nous voilà un mois et demi plus loin.  Le gros contrôle oncologique est derrière le dos.  R.A.S.  Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes…
J’ai pris mon courage (ma témérité ?) à deux mains et j’ai annoncé à l’oncologue que ce matin-là j’avais arrêté mon traitement antihormonal préventif qui m’empoisonne la vie et la santé.  Devant ma détermination elle a proposé un deal: j’arrête pendant 6 semaines, puis je reviens et on rediscute le coup en fonction de mon état.  Elle savait bien que si elle me prescrivait l’autre traitement tout de suite, je n’irais de toute façon pas le chercher à la pharmacie.  Elle est sympa cette toubib, pleine de gentillesse et de compassion.  Elle est obligée de suivre les protocoles et les statistiques qui dictent un traitement antihormonal de 5  ans pour augmenter les chances de non-rechute, elle ne peut donc souscrire à mon désir de stopper définitivement ce que moi j’appelle ce poison.  Je lui ai exprimé ma compréhension de la situation, mais aussi que finalement c’est moi qui dois assumer et prendre les décisions concernant ma vie et ma santé.  Tout est une question de point de vue: elle, elle doit suivre les diktats du monde « scientifique » soutenu par les lobbys pharmaceutiques , moi mon corps me dit qu’il supporte de moins en moins ce traitement que je lui fais subir, ma qualité de vie physique et mentale régresse et je n’ai plus envie de vivre ainsi. De toute façon la médecine classique ne garantit pas la non-rechute si je suis scrupuleusement ses conseils et je sais bien que ma santé est aussi fortement liée à un ensemble de facteurs, dont la sérénité et le bien-être mental. Le stress est à éviter au maximum.
Je suis aussi suivie par deux autres médecins compétents spécialisés l’un en médecine traditionnelle chinoise et l’autre en médecine corporelle énergétique. Tous deux comprennent à quel point les effets secondaires de ce traitement antihormonal me minent car il est très toxique pour le foie.  Les douleurs articulaires, la fatigue, la déprime, les troubles digestifs en sont des conséquences reconnues. Mon médecin de famille, elle aussi, elle me comprend et me signale qu’elle a d’autres patientes qui ont arrêté ce traitement en cours de route, tellement les effets secondaires devenaient handicapant.

Bref, après trois ans de traitements préventifs, je dis BASTA, trop is teveel, ça suffit, j’en ai ras la patate !!!  A force de vouloir éloigner le loup de la bergerie en fermant toutes les portes et les fenêtres, les moutons se meurent d’asphyxie. (c’est de mon crû)

Maintenant j’applique un autre traitement anti-cancer : j’ai démarré un traitement en phytothérapie désintoxiquant le foie, je veille à une alimentation et une hygiène de vie saine. J’essaye de me réapproprier ma vie, de trouver un équilibre entre mon dévouement pour les autres et mon « me-Time », de refaire des choses que j’aime, de prendre le temps de prendre le temps comme dirait Alexandre le Bienheureux.  Je suis retournée à la chorale du village où j’ai retrouvé le plaisir de chanter ensemble dans la bonne humeur.  J’apprends aussi à dire non, à décliner les propositions contraignantes par lesquelles je me sentirais piégée.
C’est incroyable, mais déjà quelques jours après ma décision, je me sentais mieux.  Plus de fortes douleurs de mise en route le matin au réveil, plus de vapeurs aussi envahissantes jour et nuit, plus de déprime qui me tire vers le bas… Quel soulagement ! J’avais oublié qu’on pouvait se sentir si bien dans sa peau et dans sa tête.

OUF- TI !  La vie est belle !

jeudi 7 septembre 2017

Oui mais, si on danse ?




Me revoici, avec quelques cartes postales.
Nous allons régulièrement à l’appartement à la mer. Là je peux faire la vaisselle, cuisiner un peu (Madicte est douée pour accommoder les restants de repas, elle reprend donc la main pour ainsi dire un jour sur deux !). Je me rends en handbike chez la kiné, je fais souvent un crochet par la chapelle de Notre Dame des Dunes (et parfois par chez le marchand de glace, c’est presque sur ma route).
A force de ne plus pratiquer certains mouvements, certains gestes, certaines tâches, je fini par oublier, comme par exemple les emplacements où je rangeais du matériel de bricolage dans l’atelier. Et parfois j’imagine que je sais encore : j’imaginais pouvoir déplacer des meubles de jardin… Broquette ! Impossible ! En orthographe aussi c’est bizarre : certains mots que je n’employais jamais, tel « pharmacien », « prescription », « kinésithérapeute » me sont maintenant familiers. Et d’autres mots me sont devenus étrangers, comme « hérèksion » par exemple.
Mais à côté de cela, il y a tout ce qui me fait du bien : nous avons reçu plusieurs invitations (mariages, anniversaires, …) : quand nous sommes libres nous acceptons ; c’est aussi important de garder le contact en nous déplaçant nous-mêmes  vers les autres. Cela me fait dire que beaucoup d’entre vous pensent à nous intégrer, à nous faire participer à la fête. Non pas comme si rien ne s’était passé, au contraire ! On nous prévient par exemple que les lieux sont accessibles pour les chaises roulantes, ce qui signifie que vous avez testé, que vous vous êtes renseignés. Tant d’attention, tant de prévenance… Merci ! Même si pour Madicte, les trajets en voiture ne sont jamais des parties de plaisir, nous roulons ! Heureusement elle ne doit plus conduire ! Moi qui suis resté deux ans sans conduire… chaque fois que je peux reprendre le volant je le fais avec plaisir.
Je dois veiller à respecter un équilibre entre ce que je mange et les exercices physiques. Mais cet équilibre est très instable : souvent trop de nourriture pour pas assez d’exercices ! C’est difficile de garder une discipline. Madicte est souvent là pour m’encourager heureusement. De ce point de vue, le temps passé à Pellenberg était plus bénéfique mais, et bien qu’ayant pour but de me mener à l’autonomie, moins dur puisque tout organisé : un horaire tout fait dans lequel il suffisait d’entrer. C’est aussi cela l’autonomie : me discipliner, m’imposer des choix qui sont importants pour ma santé, me forcer à l’occasion . L’autonomie, ce n’est pas la liberté et le laisser-aller.  « Calvin, fais quelque chose que tu n’aimes pas, c’est bon pour le caractère ! », comme le disait le philosophe Jacques Careuil. « C’est là qu’est l’os ! » aurait répondu le penseur Idi Amin Dada.
Depuis que maman est à Bonlez, au Home des Lilas, elle a fait du chemin : elle accepte sa nouvelle situation, elle fait doucement son deuil de la maison, se contente de quelques objets familier et symboliques pas trop volumineux auprès d’elle. Elle retrouve de vieilles photos, en épingle certaines sur un tableau d’affichage que Bernard lui a apporté. Chapeau maman ! Un nouvel univers se présente à toi, avec ses mystères, ses surprises agréables ou moins agréables. Je vois que tu récupères un tout petit peu : tu arrives à te lever de ton fauteuil et à faire quelques pas.
Nous avons régulièrement des félicitations ou des remerciements  pour notre manière d’être, pour supporter notre nouvelle vie. Je n’ai pas de recette-miracle, je peux juste vous redire ma philosophie du moment… (Nous sommes tous en chemin dans la Vie, ce qui signifie que ce qui est vrai pour moi aujourd’hui sera sans doute différent plus tard…) Déjà bien avant l’accident, je m’endormais en disant merci pour la journée écoulée. Depuis plus de 40 ans, je me sens être un des disciples d’Emmaüs. C’est-à-dire que c’est par après que je prends conscience de ce qui s’est passé. Mais contrairement à Cléophas et son compagnon de route, je ne me dis pas « Potferdeke *, il était là ! Et nous ne l’avons pas reconnu ! ». Je me dis plutôt « J’ai eu cette chance aujourd’hui : Merci ! ». Je ne sais plus, contrairement aux deux disciples, prendre mes jambes à mon cou et courir retrouver les copains pour annoncer la bonne nouvelle, mais j’ai cette possibilité de partager via FB, via le blog, via les rencontres. C’est ma recette, mais elle n’est pas universelle ; ça marche pour moi, voilà. Le Pierre d’aujourd’hui est le fruit du chemin des 58 dernières années, en ce compris les heures lumineuses autant que les heures sombres. Je pars du principe que les heures lumineuses autant que les heures sombres d’aujourd’hui façonnent le Pierre de demain, ce qui me facilite la possibilité de dire Merci chaque soir.
C’est la rentrée des classes… je me rends compte que c’est le passé pour moi. En trois ans, il y a des pages qui se sont tournées. Les contacts restent avec les collègues, certains parents d’élèves, certains anciens élèves. Mais tant de choses ont changé : nouveaux programmes, autres méthodes, réaffectations (je crois que je donne cours dans 5 ou 6 écoles…), … Je ne garde dans la gibecière de ma mémoire que les bons souvenirs, les temps forts, les moments de bonheur. Je suis de tout cœur avec vous, collègues, avec toi Oh Lumière des Lumières, mon Inspectrice Principale Préférée, avec vous parents et enfants encore tributaires du rythme scolaire. Je vous souhaite une heureuse année, un chemin agréable à parcourir. Je n’oublie pas non plus les « travailleurs de l’ombre », les discrets et efficaces qui gèrent la paperasserie et les dossiers.

·         Traduction libre de l’Araméen

lundi 24 juillet 2017

J’y serai, Boussu!





Voilà, we zijn terug! Het Leven gaat voort hier in Zepperen, met veel positieve kanten, en ook af en toe moeilijke momenten.
Deze tekst ben ik begonnen in april… Shame!
Mijn armen hebben alles gerecupereerd, ik voel me echt goe, maar beperkt in veel gebied. Ik heb zin om te koken, maar onze huidige infrastructuur is meer een rem dan een uitnodiging (behalve de oven, waar ik kan gemakkelijk een pizza of een lasagne verwarmen). Ik help Bénédicte voor de afwas (afdrogen). Tof, hé!
Bénédicte is een dikke week in Koksijde gebleven. Zij had echt nood om alleen te zijn en ook meer contact met de natuur, ver van alle paperassen. Het was ook een proeftest om te zien als ik alleen kon thuis blijven. Want ze is ook een week naar Portugal geweest. Dat is het begin van deze reeks van postkaarten.
-      Ik ben dus twee keer een week alleen in Zepperen gebleven. Zoals gezegd, pizza in den oven. Maar toch een douche elke dag. Ik vond het leuk om alles organiseren op mijn manier. Maar een week zonder mijn lieve Madam is meer dan genoeg!!!

-      Je vais le mardi “au sport” à Leuven. C’est un groupe très bigarré, avec des chaises roulantes, des amputés, etc… Il n’y a pas un sport en particulier, on fait de tout, c’est cela qui me plaît. Dans ma région on trouve aussi des groupes sportifs en chaises roulantes, mais c’est à chaque fois un sport bien particulier (badmington, ping pong, basket, …) et cela ne me tente pas. Ici on fait de tout, on court après la baballe (et on doit la rapporter), on court après la madame (mais on ne peut pas l’emporter). On fait des exercices intensifs pour  augmenter le rythme cardiaque (le tout bien contrôlé, rassurez-vous), pour découvrir ses limites et mieux se connaître. On fortifie certains muscles, on (essaye) de s’assouplir. Le temps de stretching est important après les exercices.

-      Aan zee kan ik koken, de afwas doen. Hier zet ik veel in de afwas machine. Ik zorg voor de vuilniszak, ik probeer hier en daar kleine dingen besparen aan Bénédicte. Soms denk ik dat het zo minimaal is, zo belachelijk. Maar ik doe het! Mijn leven is nu gemaakt van veel kleine dingen die soms veeeel tijd vragen. Ik kijk niet veel naar het verleden maar soms, als het gebeurt, denk ik “Ik heb de chance gehad om het te kunnen doen, om het te hebben tijdens 55 jaar”.
-      Ik zie dat veel gebaren nu gemakkelijker zijn dan 2 jaar geleden, toen ik thuis terug kwam (april 2015). De tweede verblijf in Pellenberg heeft mij serieus geholpen om durven, om de grenzen verder duwen. Maar,  vreemd, na mijn eerste séjour in Pellenberg moest ik geen luier dragen, en nu wel. Ik wens minder ‘s avonds bij mensen te blijven eten. De luiers zijn meestal goed waterdicht, maar de geuren…t’is ne probleem.

-      Je me suis rendu à Gasthuisberg tôt un matin pour un rendez-vous avec le monde médical (nous sommes fort liés depuis trois ans). La route entre St-Truiden et Tienen m’a donné l’occasion d’observer les départs matinaux pour l’école. Ici un jeune qui traine ses savates vers l’arrêt du bus… C’est sans doute la seule chose qu’il use… ses savates. Là ce sont deux copines qui ont tant de choses à se raconter… je suppose qu’elles continueront en classe, en chuchotant. Voilà une maman qui conduit sa grande fille jusqu’à l’école, en lui tenant la main. « Hé, madame ! Dans un an ta fille sera plus grande que toi, lâche-lui les baskets ! ça te rassure certainement, mais regarde-la ta fille ! tu ne vois pas qu’elle a envie d’être un peu autonome ? ». Tiens ce gamin qui roule à vélo… Heureusement que la piste cyclable est large, car à cette heure, il a tendance à dessiner des tangentes et cotangentes, des diagonales et des médianes sur le sol. Le tracé d’une parabole n’a aucun secret pour lui.  C’est sa manière à lui de réviser ses leçons de trigonométrie. Espérons qu’à l’interro son crayon sera aussi adroit et précis que les roues de son vélo. A propos de vélo, cet autre gamin qui a hérité du vélo de son grand frère: même avec la selle mise au plus bas il a du mal à toucher les pédales, il se rend sans doute à l’école de cirque. Pour descendre de sa bécane, le plus simple sera de se laisser tomber ! Je vois là ce gamin qui a loupé son bus, ça n’a pas l’air de le troubler. Il y en aura un autre, plus tard. Je me retrouve assez bien dans ce gamin. « Salut Camarade ! T’en fais pas, il vient un âge où l’école n’est même plus un mauvais souvenir… Nous passons par là, mal compris par certains profs, en ayant une place garantie dans le fond de la classe. Parfois on écoute la leçon parce que ça peut nous intéresser, mais qui croit en nous ? Si on pose une question, le prof, pour le moins étonné que nous ayons une question à poser, nous  donne la parole en soupirant. Je te le dis : encore quelques années de patience ! » (je dédie cette carte postale aux rares profs qui m’ont supporté, encouragé et accueilli au cours de mon long parcours en secondaire : monsieur Winckel, monsieur Liévain, madame Bodson, monsieur Debrie)

-      Une carte postale « vacances » : Madicte m’a aidé à retourner dans la piscine ! Pas de panique, juste une impression de bien-être. Cela demande beaucoup de préparation mais le plaisir est là. Cela fait du bien de ne pas avoir les fesses écrasées pendant une demi-heure ! J’admire comme ma Douce sait patienter et me motiver.
-      Une grive a trouvé un endroit sécurisé pour son nid dans la clématite. Les quatre jeunes ont maintenant quitté le nid ; j’en ai vu trois dans les bosquets. J’espère que le quatrième n’a pas fini dans les griffes du chat ! C’est un vrai bonheur de voir et observer les oiseaux, que ce soit dans le jardin ou ailleurs dans la nature. Il y a chaque année un peu plus d’hirondelles !

-      Maman a fait une vilaine chute à la maison: un pied dans le plâtre, l’autre avec une attelle. Elle a quitté l’hôpital après 4 jours et est maintenant dans une maison de repos. Les débuts ont été perturbants pour elle. Déracinée, elle va devoir retrouver d’autres racines, d’autres sources. Elle accepte courageusement l’idée qu’elle ne rentrera plus à la maison. Entre courage et tristesse, son cœur balance. Elle a meilleur appétit, elle est bien soignée, les gens sont vraiment dévoués. Bonne chance maman !

-      Nous nous sommes remariés ! Après 35 ans, nous avons resigné un nouveau bail. Comme le premier, c’est à durée illimitée. Nous avons d’ailleurs repris les termes du premier contrat, en y ajoutant des addenda liés à la nouvelle situation. Une belle fête, entourés de ceux que nous aimons, et en pensée avec ceux qui n’ont pas pu être là.
-      Du bonheur de revoir les écoles et les collègues ! Je sais que je m’achemine vers la mise à la pension, que c’est une suite logique ; je ne saurais plus travailler, que ce soit pour des questions d’horaire, pour des questions d’énergie, … le monde scolaire s’éloigne tout doucement de moi. Ici aussi pas de nostalgie : juste le grand bonheur d’avoir vécu tant d’années devant le tableau noir, à la salle des profs, dans la cour de récré, …
Ceci va clore mon texte : il y a trop longtemps qu’il est en chantier, et j’ai reçu d’aimables mises en garde en cas de retard abusif dans mes publications… Je reste reconnaissant pour vos réactions, vos 1000 manières de nous soutenir.

mardi 25 avril 2017

Tout n'est pas pourri dans ce royaume









Me voilà dans notre petit abri côtier. Yeux dans les yeux avec la mer et les dunes qui lui servent de paupières. Elle est de nouveau là cette mère consolatrice qui enveloppe mon regard de sa beauté changeante, ses vagues éternelles et toujours différentes. Elle se joue de la lumière complice du soleil qui fait une partie de cache-cache avec les nuages poussés par le vent, laissant de-ci, de-là une tâche bleue. Elle a le secret de panser mes plaies, mes chagrins les plus intimes et indicibles. Face à elle mes larmes peuvent couler sans honte ni gêne, elle sait ce que sont les débordements et n'y voit que l'expression d'un trop plein qui cherche à retrouver sa mesure. 




J'apprends à lâcher-prise et fais confiance à mon homme qui est en super forme et qui me donne cet espace de liberté pour me permettre de recharger mes batteries.  Il dispose des filets de sécurité nécessaires afin que je puisse me séparer de lui quelques jours sans que je stresse ni m'inquiète de son confort.
Je viens de recevoir un petit coup de fil de notre nouvelle femme de ménage qui vient de terminer son boulot chez nous et qui me fait un rapport détaillé de tout ce qu'elle a fait.  Merci Cyrina de bien veiller sur notre maison et ses habitants et de te proposer à aider Pierre en cas de soucis!
Merci à  tous ceux et celles qui sont là, prêts à tendre la main pour un coup de pouce, si nécessaire.  Merci Frédéric, Emilie et Jan pour tous les petits et grands services que vous rendez si souvent et qui rendent notre quotidien plus facile.  Merci à vous tous, nos familles, nos amis sur qui nous pouvons compter, à qui nous pouvons oser demander un service de temps à autres. Merci à vous tous qui êtes présents dans notre vie par l'amitié, la prière aussi et toutes les bonnes énergies que vous nous envoyez par le courrier cosmique.  Vous nous rendez la vie plus légère et aidez à voir la lumière qui pointe au bout du tunnel.




 Pendant les vacances de Pâques nous avons passé une semaine de villégiature à Coxyde. Yes! Les travaux sont enfin terminés et notre appartement n'est plus un parcours du combattant pour Pierre. Plus de lit d'hôpital dans le couloir, plus de toilette dans le lit, plus d'infirmière qui vient nous sortir du lit dès potron minet. Non, tout est adapté de sorte que Pierre retrouve une autonomie maximale possible. 

Hé,hé, il n'a plus d'excuse pour se défiler pour la corvée cuisine ou vaisselle... 

Nous avons même pu prendre notre premier bain de soleil sur la terrasse, c'est le pied!




Merci à Paul et Dennis VPS et à toute leur équipe d'avoir pris tellement à cœur ce chantier hors du commun.  Ensemble on a dû repenser notre appartement qui avait été entièrement rénové il y a à peine 3 ans pour que Pierre puisse y vivre "normalement".  Pour la salle de bains et la cuisine on a dû repartir à zéro, les chambres elles aussi ont dû subir des modifications: portes, électricité, élévateur au plafond, lit adapté, etc.  Tous s'y sont mis de leur compétence pour trouver les meilleures solutions aux problèmes qui se présentaient. Le résultat est là et on ne peut que féliciter l'équipe et la recommander chaudement.  




Le seul point noir au tableau: la mauvaise volonté de l'expert immobilier de l'assurance de la partie responsable de l'accident. Bref on ne se laisse pas faire et c'est un expert judiciaire qui devra trancher et indiquer les frais qui se justifient par le handicap de Pierre.



 Je suis en colère contre l'assurance de la partie adverse qui tergiverse et qui nous donne l'impression que nous sommes des profiteurs qui veulent obtenir plus que ce à quoi nous avons droit. Je suis en colère contre ses représentants quand je pense à tout ce que je dois faire et assumer pour gérer le quotidien de notre vie parce que notre habitat ne permet pas à Pierre de participer à de nombreuses tâches qu'il prenait autrefois sur lui et qui, moyennant les adaptations nécessaires, pourraient être assumées par lui. Je suis en colère contre le peu de compréhension et de considération qu'ils manifestent par rapport à tout ce que je dois faire pour compenser leurs manques de prise de responsabilité. Il est clair que si Pierre vivait tout le temps seul, il ne serait pas en mesure de rester à la maison sauf encadrement d'une tierce personne plusieurs heures par semaine. 

Le 4 avril dernier j'ai dû me présenter devant la commission des pensions, vu l'épuisement des jours de congé de maladie auxquels j'avais droit. Ce sont les médecins contrôle eux-mêmes qui spontanément m'ont proposé de me mettre à la pension anticipative pour des raisons de santé.  Ils ne voyaient pas comment je pourrais reprendre après deux ans et demi de congé de maladie une vie professionnelle 'normale' vu mon état de santé fragile et notre situation familiale qui me dépose une charge supplémentaire sur les épaules.
J'ai été vraiment touchée par l'humanité et la correction de ces deux médecins, qui pourtant ont un rôle difficile et se font facilement qualifiés de sévères. Mon dossier médical bien étayé et un examen superficiel leur ont suffi pour se faire une idée objective de mon état et de mes capacités de reprendre ou non une vie professionnelle.
Je me suis rendu compte que, chargée par la galère que nous vivons avec l'assurance de la partie adverse, j'ai développé un apriori de méfiance par rapport à toutes les instances qui doivent statuer sur notre situation et nous dédommager. Pourtant mis à part cette assurance, souvent nous avons eu affaire à des personnes compétentes et de bonne volonté, mais souvent aussi c'était un parcours du combattant pour arriver à régler toute la paperasserie nécessaire. Je pourrais écrire un livre rien qu'en énumérant toutes les démarches et les (ab)errances que nous avons rencontrées, je peux vous dire que c'est usant et que parfois on se demande si cette lourdeur administrative n'est pas faite pour décourager les ayant-droit de sorte qu'ils renoncent à leurs droits. 
Je porte tellement de casquettes qu'on ne peut plus les compter, j'ai perdu celles qui faisaient de moi une prof enthousiaste et appréciée, celles qui me donnaient une satisfaction professionnelle,  une valorisation sociale. Je les ai remplacées par celles d'une femme au foyer fragilisée qui doit être forte et ne peut craquer, qui essaye d'assurer toutes ses tâches d'épouse (toujours amoureuse depuis plus de 35 ans), ménagère (très mauvaise, mais qui fait ce qu'elle peut), infirmière (sexy), secrétaire (pointilleuse), cuisinière (vite fait, bien fait), couturière (spécialisée dans les déchirures des pantalons qui restent accrochés derrière le garde-boue du fauteuil roulant), lavandière (heureusement que les machines à laver existent!!), gestionnaire (vive Internet, le Netbanking!, les mails, l'imprimante scanner), piscinière (mon assurance santé) etc. 
Que je m'épuise parfois à devoir assumer tous ces rôles, que je doive m'habituer à vivre à un rythme  beaucoup plus lent que le mien, que chaque instant passé au milieu de tous les équipements adaptés pour Pierre me confronte à la perte irréversible de tant de bonheur, que je me sente déchirée entre le soutien et la présence à assurer près de Pierre et mon besoin parfois de souffler et de lâcher prise pour recharger mes batteries, exister autrement en faisant des activités seule ou avec des amies, que je sois parfois lasse de ma battre, que parfois je me dise que je n'ai pas envie d'atteindre un âge avancé, mais que surtout je ne veuille pas partir avant Pierre parce que je ne voudrais pas l'abandonner; de tout ça je me doute bien que cette assurance et ses experts ne se soucient pas et que cela ce n'est pas leur problème. Je ne sais pas s'ils sont conscients du stress et de la maltraitance psychologique qu'ils nous imposent. Nous avons le sentiment que c'est à dessein qu'ils nous laissent mariner afin de pouvoir mieux nous pigeonner après, une fois de guerre las. Nous le voyons comme une stratégie, une forme de cynisme calculé, car leur priorité selon nous ce n'est pas de dédommager correctement les victimes ou de les aider à retrouver un sens à leur vie, c'est surtout de boucler leurs dossiers en déboursant le minimum et en permettant ainsi à leurs dirigeants d'avoir des salaires indécents (tiens, j'ai vu que le CEO d'ING banque a vu son salaire augmenté l'année passée, c'est sans doute grâce à tous les licenciements qu'il a pu arrangés)  et à leurs actionnaires d'avoir un bon dividende.



Dans la veine des Idées Noires de Franquin: j'ai dit au début à un assureur que le chauffeur aurait sans doute mieux fait de tuer Pierre, ça leur aurait moins coûté.  Évidemment le chauffeur qui s'était donc "fait percuter par un motard pendant sa manœuvre" a fait de son mieux, il a même presque réussi, mais malheureusement pour l'assurance, Pierre était en bonne condition physique et il a ressuscité.  Avec sa rage de vivre et de dépasser tous les obstacles qui se mettent sur son chemin et avec sa femme qui ne lâche pas le morceau quand il s'agit de réparer une injustice faite, l'assurance est très mal tombée (bien que ce soit Pierre qui ait fait la chute).
Je sais, je me lâche, mais j'ai l'impression qu'ils oublient que derrière chaque numéro de dossier se cache un drame qui contient beaucoup de souffrance humaine qu'ils attisent à cause de leur manque de diligence ou même d'humanité.



Oui je sais, beaucoup de personnes essayent de tricher et de tirer un maximum des assurances lors d'un sinistre.  Cela entraîne la méfiance de la part de celles-ci, elles ont le droit d'étudier les dommages et de faire la part des choses.  Cela c'est normal. Mais qu'un expert payé par la partie en faute ose dire qu'il se pose la question s'il faut que Pierre puisse cuisiner dans sa seconde résidence (c'est du sexisme), qu'il décrive la rénovation  à peine terminée en 2012 comme un "embellissement de qualité moyenne" alors que nous y avions investi des dizaines de milliers d'euros, qu'il estime qu'un agrandissement de notre maison comme nous le souhaitons ne se justifie pas vraiment, qu'il nous fasse attendre 6 mois avant de nous faire parvenir son premier avis, cela à nos yeux ce n'est plus normal et nous fait plus penser à une technique délibérée de sape.



Je crois que certains experts assureurs n'ont pas l'ombre d'une idée de ce que peut représenter l'impact d'un accident avec lésions corporelles irréversibles sur la victime et tout son entourage proche. Je trouve que ces personnes devraient être obligées de vivre une fois en chaise roulante, de ne pas pouvoir utiliser leurs jambes pendant au moins quinze jours, avant de pouvoir s'occuper d'un dossier pareil et de se nommer expert de la chose.  Le prof de sport de Pellenberg qui donne cours aux personnes en chaise roulante fait partie d'une équipe de basket en chaise roulante.  Je vous assure qu'il sait ce que c'est, lui de se mouvoir ainsi.
 Ce n'est pas pour rien que les victimes des attentats de Bruxelles et leurs proches ont exprimé leur déception et leur désarroi par rapport à leur prise en charge par les autorités et les assurances. Nous les comprenons bien, sachant pourtant que nous avons encore cette chance d'avoir une assurance recours en justice (qu'il a fallu faire activer par un ami bien placé, car notre courtier voulait d'abord faire régler le sinistre par des arrangements à l'amiable...) qui nous permet d'être assistés et soutenus par des professionnels compétents, compréhensifs et bienveillants.



Tout n'est pas pourri dans ce royaume ;-)