Voici
plus de deux mois que mon accident est arrivé.
Deux longs mois mais en même temps courts par rapport à ce qui m’attend…
Ce
dernier mois m’a surtout vu admirer Madicte face à tout ce qu’elle
vivait ; je me suis senti impuissant, désarmé, parfois tout petit à côté
d’elle. Puis un jour je me suis dit que me sentir « tout petit » ne
m’apportait rien de bon, ne m’aidait pas à aller de l’avant, surtout que dans
le même temps Madicte me disait trouver son énergie en moi (entre autres). Moi
qui n’arrête pas de dire à mes élèves que cela n’apporte rien de se comparer
aux autres, il est temps que j’applique au moins une fois tout ce que
j’enseigne !!! Donc, plutôt que de me minimiser, j’ai regardé les
évènements autrement. J’ai repris confiance en moi, surtout après l’opération.
Les exercices de kiné évoluent, je vois les progrès. En conclusion, je retiens
mon admiration pour ma douce. Nous pouvons nous épauler, compter l’un sur l’autre.
Nous
avons découvert qu’il nous fallait du temps à deux, c’est ainsi que nous nous
réservons le samedi, jour où Madicte reste loger à Pellenberg. Ce sont des
moments importants pour nous. J’ai aussi limité les visites à deux par jour,
pour profiter de chacun de vous. Cela permet une rencontre plus longue aussi,
ce que j’apprécie ! Ne vous inquiétez pas d’arriver les mains vides :
vous êtes le cadeau ! Cela fait un peu cliché, mais c’est sincère ;
de plus je croule sous le chocolat ! Si j’ai la simplicité de vous le
dire, ne vous vexez pas ; je pense que dans ce cas la franchise est
importante. Quand vous venez, vous pouvez toujours me demander un peu à
l’avance si quelque chose me ferait plaisir, ou me manque. Bien que mes besoins
matériels soient limités ici (on est proche de l’ascétisme !)
En ce
moment, ce qui est le plus dur, c’est de ne pas rentrer à la maison. Je sens
que le jardin me manque, le chat sur mes genoux, l’ambiance de chaque pièce, …
je sais aussi que cela fait partie de mon chemin. Dans beaucoup de domaines je
suis patient ou, plus exactement, je prends ce qui vient au jour le jour.
Est-ce cela la patience ??? Mes journées se remplissent de plus en
plus ; en plus des séances de kiné et d’ergo, il y a des activités de
groupes (atelier d’écriture, cours divers; je vais regretter l’enseignement et
ses congés…). L’horloge du living s’est arrêtée (c’est moi qui la remonte) il y
a plus de deux mois. Madicte attend mon retour définitif à la maison pour que
le temps reprenne son tic tac dans la maison. Moi de mon côté je vis sans mon
alliance depuis l’accident ; Madicte me la conserve avec soin et Amour
pour me la rendre quand les circonstances seront favorables. J’aimerais nous
« remarier », reprenant en partie le texte de notre engagement d’il y
a 32 ans, et en l’adaptant à notre actualité.
Je
reste impressionné par vos messages, par tout ce que vous exprimez. Je n’arrive
pas à répondre à chaque message et m’en excuse auprès des « sans
réponses ». Je loupe systématiquement vos appels téléphoniques. Je n’arrive
pas à prendre mon gsm en main quand il sonne et à décrocher à temps. Mes deux
poignets limités dans leurs mouvements me permettent d’envoyer des sms. Je peux
à l’occasion envoyer un mail, mais il faut que toutes les conditions soient
réunies : ordinateur à portée de mains, quand j’ai une heure libre, cela
vaut la peine de demander à mes anges gardiens en blanc de m’installer l’engin,
de me le mettre sur ma petite tablette qui sert pour les repas, etc… Travailler
sur une table est exclu (chaise électrique trop longue, pas proche d’une
table).
On ne
sait toujours pas si je retrouverai l’usage de mes jambes, même si la
probabilité est très faible. Je vis au jour le jour, me concentrant sur les
progrès en kiné et en ergo. Cela ne veut pas dire que je mets mes jambes de
côté, mais ce n’est pas la priorité du moment. Je suis conscient que des signes
de mobilité devraient apparaître dans les deux à trois mois après
l’accident ; nous sommes à deux mois et demi… Ne pouvant renforcer mes
bras (à cause des deux poignets immobilisés), ça avance lentement. L’évolution
se voit dans des exercices de maintien en équilibre ou de redressement (j’en
suis au niveau de tout petits enfants dans leur parc, entourés de coussins et
de couvertures pour ne pas se faire mal quand ils tombent en cherchant leur
équilibre…). Je tiens sans problème redressé sur une table (de redressement)
pendant 20 minutes à condition d’avoir les jambes en mouvement, stimulées par
une machine qui reproduit les mouvements de la marche. La circulation du sang
étant meilleure, je ne tombe plus dans les pommes. Chaque jour m’apporte sa
petite victoire. Les personnes qui m’entourent et me soignent sont terriblement
motivantes, apportent leur expérience à chaque instant, me conseillent,
relancent la machine. CHAPEAU à TOUTE l’équipe ! MERCI à TOUTE
l’équipe ! Je peux dire de chaque personne qu’elles colorent mes journées
de par leurs qualités, leurs attentions, leur prévenance, leur qualité
d’écoute. La communication est extraordinaire d’un service à l’autre, d’un
switch à l’autre. Je ne sais pas si ce que je vais dire est correct : j’ai
deux vies. L’une ici à Pellenberg, où je suis porté, soutenu, soigné,
encouragé, poussé, … par tout le personnel. L’autre, c’est ici à Pellenberg, où
je suis porté, soutenu, encouragé, poussé, … par vous tous ! Je voudrais
citer cette grande dame, Annaïck Laborné, qui parle des relations humaines en
les comparant aux édifices religieux. Chaque pierre a sa raison d’être ;
si on en enlève une, l’édifice risque d’être déséquilibré. Chaque pierre est
solidaire des autres (solidaire : solides, ensemble !). Ensemble,
nous formons un bel édifice ! Et pour les amis laïcs qui seraient troublés
par l’idée de former un édifice religieux, imaginez un autre bâtiment moyenâgeux
de votre choix ! J
Madicte
est allée se reposer quelques jours à la mer avec Marie-Claire. Elle en est
revenue avec une mine superbe ! Ce jeudi 28.8, nous avons été en
consultation à Gasthuisberg pour elle, pour voir la suite du programme
préventif. C’est dur pour elle, mais elle vous en parle elle-même. Merci pour
toutes les pensées pour elle à cette occasion !
Je
m’arrête ici : il y a trop longtemps que ce texte est en chantier ;
il faut maintenant vous le livrer ! Chacune et chacun se retrouvera dans
ce dernier mot : MERCI !
(deux
chansons que j’écoute beaucoup ces derniers temps « Simply the Best »
de Tina Turner et « you’ll never
walk alone » de Elvis Presley. Seuls les titres m’intéressent, ainsi que
la mélodie.)