lundi 29 septembre 2014

Panique à bord !





Me revoici, avec d’autres nouvelles. Au moment où je commence ce texte, je ne sais pas si Madicte est en train d’en écrire un… Il est donc possible que certaines infos se retrouvent deux fois sur le blog…
Avant de vous relater les étapes suivantes de ma vie monacale, je voudrais revenir un instant sur tous les anges qui peuplent cette vie (et qui font qu’elle n’ait plus rien de monacal). Je parle des infirmières… Chaque jour apporte son lot de surprises, de sourires. Je peux dire de chacune d’elles qu’elles sont des exemples de patience, d’écoute, de disponibilité, d’accueil, de compréhension. Le travail qu’elles ont choisi ne leur donne pas de repos; les horaires sont tellement ficelés qu’elles passent d’une chambre à l’autre en transpirant le matin au moment de la toilette. Quand il faut préparer 25 ou 30 personnes pour 9.00 h du matin, en commençant à 7.30 h, en cela compris petit déjeuner, toilette, soins particuliers et transfert dans la chaise roulante avec le lift spécial… il n’est pas question de souffler entre deux patients ! Je suis en admiration et plein de respect devant ce travail ! Et elles ont toujours un petit mot, une attention qui personnalise la rencontre. Nous ne sommes pas des numéros de chambres, nous sommes vraiment des personnes. Personne ne néglige sa peine, c’est incroyable ! Il y a dans le bâtiment, affichées aux murs,  des coupures de journaux, un reportage sur les personnes en revalidation ici à Pellenberg ; c’est vraiment bien fait ! On présente des personnes qui s’en sortent à des degrés divers, mais toujours très positives. Je me dis que ces personnes, et toutes celles qui n’ont pas été interviewées, ont le moral grâce à nos anges gardiens. Qui plus qu’elles recueille nos confidences ? Elles sont en première ligne. Le service de nuit  est aussi extraordinaire. Est-ce l’ambiance particulière nocturne qui favorise les échanges ? Est-ce le fait que beaucoup d’entre les revalidants dorment et que l’heure soit plus propice à l’écoute ou à la confidence? Bien que pendant la journée, la qualité d’écoute soit aussi importante !
Je parlais de tout cela avec Bieke, une infirmière qui ne fait que le service de nuit. Elle m’a expliqué que ce n’est pas complet de ne citer que les qualités des infirmières. Toute revalidation nécessite la participation et la motivation de la personne alitée ; sans cela, les infirmières rameraient contre le courant. Il faut que l’impulsion vienne du patient. Je ne le voyais pas sous cet aspect, mais en effet c’est exact : je suis le premier à être partie prenante de ma revalidation !
Tout ceci fait partie d’un ensemble ! Je ne mets nullement les autres personnes de côté : les kinés, les ergos, les profs de sport (j’ai recommencé le ping-pong). Tous et toutes ont une place importante, que ce soit dans la motivation à nous dépasser dans les efforts physiques, dans l’aide apportée pour y arriver, dans la ténacité quand celle-ci nous fait défaut. Petite anecdote: dans mon planning, je voyais que j’étais inscrit pour des séances de fitness. Séances auxquelles je ne participais jamais… Jusqu’au jour où l’un des kinés qui s’occupe du sport est venu me chercher, en m’expliquant que le fitness était bon pour moi. Je lui ai dit que je ne me voyais pas vraiment danser au rythme des tambourins… En fait je confondais fitness et aérobic ! Comme disait le poète André Rimbourg : « Bête et lourd, on apprend tous les jours »
Depuis que mon poignet droit est libéré, l’autonomie s’accentue: petits essais en chaise roulante manuelle (le poignet droit souffre du manque (actuel) de force) ; autonomie dans ma toilette; possibilité de serrer les gens dans mes bras ; capacité de couper ma viande seul en employant les couverts, tenir mon verre dans la main droite, etc. … Bref, que du bon dans des petits gestes si simples du quotidien !
Parmi les bonheurs à vous partager, il y a eu ce vendredi dans la salle de kiné un moment « magique ». Dries, le petit garçon qui n’a plus de pieds et qui vient chaque jour à la kiné recevait pour la première fois ses prothèses ! Il a donc fait ses premiers pas devant une dizaine d’adultes tout cassés… Il n’y a pas de mots pour vous dire l’émotion et la joie qui régnaient dans la pièce… Comme dit le philosophe Luc Aerens : « WAOW ! »
Petite victoire qui date déjà d’une bonne semaine: le vendredi 19 septembre, j’avais une séance de kiné à 15.00 h. La salle de kiné était presque vide. Il y avait trois stagiaires qui restaient et se sont occupées de moi. L’un des exercices consistait à me placer sur le ventre sur une table, puis les bras en croix, il me fallait lever ceux-ci vers le plafond. Le bras gauche a commencé le mouvement sans difficulté mais le droit ne décollait pas de la table. A chaque mouvement (je devais faire une série de 25), la stagiaire comptait jusque 5 pour maintenir l’effort. Après une dizaine de tentatives, je pleurais de ne pas y arriver. La stagiaire s’est alors accroupie près de moi en continuant à compter. Je pleurais de colère, de dépit, de tristesse. Dans le comptage, elle était à 15 ou 16… elle pleurait avec moi, essayant entre deux sanglots de maintenir le rythme. Elle avait deux mouchoirs: un pour elle, l’autre pour moi. Et toujours ce bras droit qui restait collé à la table ! Une douleur de plus en plus forte dans l’épaule n’arrangeait pas mes pleurs. Arrivé à 21… mon bras droit a enfin quitté le contact avec la table !!! Mais les sanglots ont redoublé (émotion, quand tu me tiens). Toute petite victoire, mais très importante ! Ma rééducation va passer souvent encore par de toutes petites étapes sans doute douloureuses, mais à chaque fois je me vois avancer ! La Vie est belle !

Même si la Vie est belle, il y a parfois des moments moins gais : depuis mon accident, j’ai attrapé une phobie des piqures. Au cours des premières semaines, j’ai trop entendu lors de piqures ou de prises de sang « Vous n’aurez pas mal » ou « Vous ne sentirez presque rien » ou encore « Ca ne durera pas longtemps » sans oublier les « ça va faire un peu mal ». J’ai encaissé et subi toutes ces douleurs sans pouvoir lever le petit doigt. Je suppose que d’un point de vue extérieur, cela a un côté puéril, mais une des conséquences de cela est que je ne supporte plus les piqures. Quand on m’a enlevé le fixateur du poignet droit, j’avais demandé une anesthésie totale. Qui était accordée. Mais voilà que dans la salle de préparation avant l’intervention, l’infirmière apporte un baxter. Etant donné ma grande expérience chirurgicale, je lui ai dit qu’il n’en fallait pas. Mais étant donné sa grande expérience chirurgicale, elle m’a répondu qu’il était obligatoire. J’ai été pris d’une telle panique que je me suis presque enfui de mon lit, passant le torse au-dessus des barreaux de mon lit, prêt à me jeter au sol. Mais seul contre trois ou quatre infirmières, j’ai dû reprendre la position « couché ! ». On m’a alors donné un calmant et on a postposé mon opération d’une heure pour que je retrouve un peu de sérénité. Puis on m’a à nouveau « préparé », avec un baxter cette fois. J’ai expliqué mes peurs, mes craintes, mes phobies, mes fantasmes : « oui, mais si je fais un faux mouvement et que l’aiguille bouge et me blesse, me déchire la veine ? ». Avec un calme olympien, que dis-je un calme dalaï lamatien !, l’infirmière m’a expliqué qu’il ne resterait pas d’aiguille, juste un « bout de tuyau » dans la veine. Et qu’avec du sparadrap tourné autour de mon bras, rien ne bougerait. Elle a cependant concédé qu’un tour ou deux de sparadrap en plus pouvaient me rassurer (quand je vous dis que les infirmières sont à l’écoute !!!). Nous avons trouvé un deal: elle a employé tout son rouleau de sparadrap ! Puis j’ai demandé à tenir au moins un mètre de tuyau en mains, par sécurité, pour qu’en cas de tension du tuyau, je puisse moi-même donner du mou. Accordé ! Peu après, entrée en salle d’opération, déplacement du lit à la table, tentative personnelle de détente, masque sur le visage… Puis plus rien. Jusqu’à ce que, 12 minutes plus tard, une voix me parle doucement pour me réveiller. Toute cette panique pour 12 minutes… je me sentais vraiment ridicule. Mais là aussi, l’infirmière m’a mis à l’aise, me disant que je ne suis pas le seul dans cette situation. Puis elle m’a aussi dit qu’elle allait enlever le baxter et que cela ne ferait pas mal du tout. En effet, je n’ai rien senti. Mais je ne vous parle pas des 3 mètres de sparadrap qu’il a fallu décoller avant ! C’est du bon sparadrap, ça colle bien ! Rassurez-vous, les poils du bras repoussent… Si certains d’entre vous me trouvent courageux et exemplaire ces derniers mois, voici bien une histoire qui va remettre les pendules à l’heure…

Cette semaine était riche en bonnes nouvelles :
Madicte va mieux et ne se sent plus malade (elle reste bien faible et sans énergie, mais n’est plus envahie de nausées).
Je peux rentrer un jour à la maison, samedi 4 octobre.
Emilie a trouvé du boulot.
Mon accident est reconnu comme accident du travail.
J’ai fait mes premiers tours de roue dans une chaise roulante manuelle.
La Vie est belle. Mais là, je me répète peut-être ?
Il y a des progrès au niveau équilibre (physique ! pour le mental, on estime que c’est perdu… ;) ).
Papa a eu un entretien avec le médecin : il ne devra pas passer par la chimio !

Merci à tous et toutes pour tous les mots, les gestes, les prières ! Bloqué ici, je profite des visites qui continuent chaque jour ! Je me permets de vous rappeler qu’un rendez-vous est VRAIMENT mieux pour moi ; une visite à l’improviste est une surprise agréable, mais il est arrivé que des visites alors se chevauchent, et que certains visiteurs écourtent leur passage, d’où une double frustration. C’est vraiment important pour moi de profiter de chacune et chacun.
N’oubliez pas : « always look on the bright side of life ! »

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